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Bienvenue sur le podcast de dixit.net, une agence de conseil et de recherche urbaine. Nous donnons ici la parole à celles et ceux qui font la ville d'aujourd'hui et de demain.
Latest episodes

May 27, 2024 • 25min
#101 Construction en circuit court · BAT'IPAC
Le secteur du bâtiment est le second secteur émetteur de gaz à effet de serre en France. La recherche de nouveaux matériaux moins gourmands en CO2 constitue une réponse pour réduire la facture carbone du secteur. Mais un matériau décarboné l’est-il vraiment s’il est produit à l’autre bout de l'Europe ? L’empreinte carbone liée au transport des matériaux ne doit pas être négligée. Les entreprises doivent ainsi réfléchir non pas seulement à l’innovation en termes de produit, mais également en termes de procédés, pour proposer un maillage territorial diminuant les kilomètres entre lieu de production et lieu d’utilisation.
Nous sommes allés à la rencontre de BAT'IPAC une entreprise nantaise, qui propose un produit innovant pour répondre aux enjeux de la fabrique de la ville, mais qui a aussi réfléchi à comment diffuser ce produit dans toute la France en essayant de réduire au maximum le nombre de kilomètres parcourus.
BAT'IPAC, est une société vendant des panneaux isolants en carton. Un matériaux isolant recyclé et recyclable qui s’appuie sur un maillage territorial fin pour l’approvisionnement en matière première, le carton. En effet BAT'IPAC travaille avec une entreprise de recyclage du carton qui a des unités de production partout en France. L’approvisionnement et la production des panneaux isolants se fait au plus proche des lieux d’utilisation, pour cela l’entreprise a développé une ligne de production légère s’appuyant sur les établissements et services d'aide par le travail (ESAT). Ainsi l’entreprise réduit son empreinte carbone tout en permettant à des personnes éloignées du travail de se réinsérer.
Pour découvrir cette démarche innovante je vous invite à écouter le podcast qui suit. Bonne écoute !

Apr 16, 2024 • 26min
#100 Construction en circuit court · Zoïdcity
Le secteur du bâtiment est le second secteur émetteur de gaz à effet de serre en France. La recherche de nouveaux matériaux moins gourmands en CO2 constitue une réponse pour réduire la facture carbone du secteur. Mais un matériau décarboné l’est-il vraiment s’il est produit à l’autre bout de l'Europe ? L’empreinte carbone liée au transport des matériaux ne doit pas être négligée. Les entreprises doivent ainsi réfléchir non pas seulement à l’innovation en termes de produit, mais également en termes de procédés, pour proposer un maillage territorial diminuant les kilomètres entre lieu de production et lieu d’utilisation.
Nous sommes allés à la rencontre de ZoïdCity, une entreprise de la métropole nantaise, qui propose un produit innovant pour répondre aux enjeux de la fabrique de la ville, mais qui a aussi réfléchi à comment diffuser ce produit dans toute la France en essayant de réduire au maximum le nombre de kilomètres parcourus.
ZoïdCity est une société qui propose une solution à la sous-occupation des bâtis et facilite leur réemploi. A la manière des poupées russes, l’idée est de construire dans des enveloppes bâties non-utilisées, des modules en bois : les zoïds. Ainsi pas besoin d’isoler l’intégralité du bâtiment, ou de commencer d’importants travaux de réhabilitation pour réutiliser l’espace et intensifier ses usages. Chacun peut créer un volume adapté à ses besoins avec un ou plusieurs modules, et le modifier à mesure que les usages évoluent. La construction et la modification des zoïds est d’autant plus facile que les plans détaillés sont disponibles en open source sur le site internet de l’entreprise. La société ne vend que les pièces métalliques spécifiques et nécessaires à la structure du bâtiment. Ainsi les zoïds peuvent être construits par les charpentiers locaux avec du bois, seules les pièces métalliques voyagent à travers les territoires.
Pour découvrir cette démarche innovante je vous invite à écouter le podcast qui suit. Bonne écoute !

Apr 9, 2024 • 52min
#99 Hiba Debouk · "Nos futurs"
👾 "Nos futurs"
En ce moment, la planification territoriale a la fâcheuse tendance à se transformer en foire d’empoigne autour d’un tableur Excel. C’est une forme de lutte pour la place (artificialisable) obnubilée par un présent simpliste, alors que l’on aurait bien besoin de travailler collectivement des futurs compliqués. Et si c’était le moment de renouveler la prospective territoriale dans cette période de turbulences ? Les crises écologiques imposent de regarder le temps long en face, alors on observe ici et là émerger des démarches de prospectives intéressantes. Elles sont souvent découplées de l’élaboration des documents de planification urbaine, et vont même parfois jusqu’à transgresser les frontières administratives. J’ai eu l’occasion d’en suivre quelques-unes, mais surtout d’échanger récemment avec Hiba Debouk, qui est intervenue pour AREP dans plusieurs démarches de ce type. Je vous invite à écouter cette discussion dans le podcast ci-dessous, dont je tire plusieurs pistes.
D’abord, que le temps où l’on se choisissait un futur est révolu. Non seulement les crises écologiques réduisent notre champ de liberté, mais elles nous font rentrer dans une époque marquée par l’incertitude, nos Trente Turbulentes. Affronter cette crise du brouillard commence donc par renoncer à arbitrer entre des scénarios, pour garder les futurs toujours au pluriel, et regarder les plus inconfortables en face.
Mais sortir d’une planification déterministe qui pave le chemin vers un futur aussi optimiste que vain n’est pas non plus renoncer à l’action et à notre capacité à agir, bien au contraire. La prospective n’est pas un passe-temps théorique, c’est un puissant moyen de passage à l’action. Penser après-demain, permet de prendre aujourd’hui des décisions éclairées par le détour prospectif, et de structurer des plans efficaces, car adaptables. C’est justement parce qu’il y a urgence à agir qu’il faut plus que jamais regarder au loin.
Je retiens surtout de cette conversation que la prospective ne doit pas rester l’œuvre d’experts. « Nos futurs » (pour reprendre le titre de l’excellent podcast du CAUE de Haute-Savoie), sont de magnifiques sujets de conversation démocratique qui doivent désormais être pleinement entre les mains des citoyens. Ce sont aussi de formidables moyens de dessiner une vraie coopération territoriale qui sera déterminante pour gérer les crises comme pour mener les transitions. Et si s’imaginer des futurs communs, au-delà des frontières des institutions, était le meilleur moyen pour faire territoire ? Des lieux, des gens et des liens tissés en s’imaginant des futurs à soi, quoi de mieux pour revenir convaincu de la nécessité de mener collectivement les transitions nécessaires ?
– Sylvain Grisot (Linkedin)
Pour aller plus loin :
No(s) futurs, le podcast du CAUE de Haute-Savoie : https://ilot-s.caue74.fr/publications/nos-futurs-podcast/nos-futurs/
L’exposition “Réparer le futur” du même CAUE, dont Hiba Debouk est commissaire : https://ilot-s.caue74.fr/expositions/expositions-hors-les-murs/reparer-le-futur/
“1962 : les enfants imaginent l'An 2000...”, une vidéo de l’INA : https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/man4824558779/1962-les-enfants-imaginent-l-an-2000
Le Joli Mai - Les grands ensembles, de Chris Marker : https://www.youtube.com/watch?v=eUY9XzjvWHE
Les illustrations d’Albert Robiba : https://gallica.bnf.fr/conseils/content/albert-robida

Apr 8, 2024 • 53min
#98 Mathilde Chaboche, Claire Demaison et Sylvain Grisot · Rencontre au Tiers Lab des Transitions à Marseille
Bonjour,
Je suis Sylvain Grisot, urbaniste fondateur de dixit.net.
Une fois n'est pas coutume, je vous propose dans ce podcast d'écouter une conférence à laquelle j'ai participé le 28 mars 2024. Pas pour mes belles paroles, mais pour celles de mes deux comparses dans ce moment tout à fait singulier, dans ce magnifique espace qu'est le Tiers Lab des transitions dans le quartier des Chutes-Lavie à Marseille.
Vous allez donc entendre Mathilde Chaboche, urbaniste, Conseillère municipale de Marseille, ainsi que Claire Demaison, Co-fondatrice du LICA et du Tiers-Lab Des Transitions, qui nous raconte l'aventure qu'a été l'invention de ce lieu particulièrement accueillant.
Bonne écoute à toutes et à tous.

Apr 2, 2024 • 27min
#97 Kévin Brun · La nouvelle vie de l’usine Gégé
🧸 La nouvelle vie de l’usine Gégé
Vos parents ou vos grands-parents ont sans doute eu des jouets ou des poupées Gégé quand ils étaient petits, et peut être même vous-même. Il s'agissait de jouets français fabriqués à Montbrison, une ville moyenne située entre Clermont-Ferrand et Lyon. Fondée dans les années 1930, cette entreprise a prospéré pendant plusieurs décennies avant de connaître le déclin dans les années 1970, jusqu’à sa fermeture définitive en 1979.
La mairie rachète le site en 1991, mais malgré ses tentatives de réhabilitation le site reste en friche pendant 40 ans. Il faut dire que sa rénovation est notamment contrainte par sa dimension patrimoniale, car l'ancienne usine Gégé est classée « immeuble d'intérêt patrimonial majeur ». Un classement justifié par son architecture marquante des bâtiments industriels des années 1930, mais aussi parce que le bâtiment représente une partie de l'histoire locale, et de nombreux habitants ont un membre de leur entourage qui a travaillé dans cette usine. L'enjeu de la réhabilitation est donc de transformer le bâtiment tout en conservant son architecture et en mettant en valeur son histoire.
En 2018, le PUCA et l'ANCT lancent le dispositif « Réinventons nos cœurs de ville » à destination des villes participant au programme « Action Cœur de Ville ». La mairie de Montbrison décide de soumettre une candidature pour permettre la réhabilitation de cette friche industrielle. L'appel à projet est lancé en juillet 2019, et en octobre 2020, un groupement inédit, composé d'un bailleur social, d'un aménageur et de deux promoteurs, est désigné lauréat. Pour intégrer le site dans le tissu urbain existant, le projet prévoit de transformer le bâtiment industriel en logements, de construire quelques logements individuels, des commerces, des services et de créer un espace public pour accueillir un marché en plein air. La mixité sociale et intergénérationnelle est au cœur du projet, car elle permet d’apporter une réponse au vieillissement de la population. Pour cela, des logements sociaux adaptés aux seniors sont prévus, ainsi qu'un pôle de santé.
Pour comprendre plus en détail ce projet, j'ai rencontré Kevin Brun, chargé de projet Action Cœur de Ville à l'agglomération Loire Forez. Ce que j'ai retenu de cet échange, c'est que la réhabilitation d’une friche est une recette complexe qui nécessite au moins 4 ingrédients essentiels. De l'argent évidemment, avec quelques millions d'euros de déficit dans le cas du projet Gégé. Un portage politique ensuite, qui a besoin de s’appuyer sur un vrai accompagnement en ingénierie. Mais il faut surtout du temps, un tel projet ne se monte pas en quelques mois, il faut plusieurs années pour affiner le projet, définir clairement le périmètre d'action, et identifier les enjeux.
Je vous laisse découvrir cet entretien dans le podcast ci-dessous. Bonne écoute !
Camille Tabart
Pour aller plus loin :
Le livret retour d'expérience du PUCA sur "réinventons nos coeur de ville" :https://www.urbanisme-puca.gouv.fr/reinventons-nos-coeurs-de-ville-retour-d-a2512.html
Note de la fabrique de la cité, du 26 janvier 2023 : Artificialisation : quels avenirs pour les maisons individuelles ? (lafabriquedelacite.com)

Mar 19, 2024 • 26min
#96 François Houste · La ville de science-fiction
Il y a deux mois j’ai lu Les furtifs d’Alain Damasio, et j’ai été soufflée par la société de demain qu’imagine l’auteur : les villes privatisées sont administrées par des entreprises, et l’accès à de nombreux espaces dépend désormais des revenus de chacun. Les relations entre individus sont quasiment inexistantes, les gens vivent côte à côte, chacun dans leur bulle, embellie par la réalité virtuelle.
Mais l’auteur montre qu’une autre vision de la ville est possible, avec des groupes d’insurgés qui entrent en rébellion contre cette société aliénante et isolante. Ils représentent une vision plus désirable du futur, organisée autour des rapports humains, de l’égalité entre les citoyens, du respect de la nature et d'une créativité qui invente de nouveaux moyens de faire la ville :
"L’idée, ça a toujours été que les villes sont trop conçues… trop vécues du sol. C’est la voiture qui a créé nos villes. Le trottoir même est une invention de la voiture, les feux, les ronds-points, les avenues ! On voulait trouver d’autres chemins, des trajets qui ne décalquent pas les rues… des obliques, des traçantes… Et on s’est dit que l’espace existait, il existait là-haut…il existait sur les toits, que notre bitume, il serait bleu."
Les villes dépeintes dans cette fiction semblent être le prolongement de signaux faibles que nous observons aujourd’hui : la privatisation des espaces publics s’observe déjà dans certaines de nos métropoles, nombreuses sont les personnes vivant en ville qui ignorent qui sont leurs voisins et voisines, et la vie en communauté respectueuse de l’environnement et de l’humain fait rêver de nombreux citoyens. En tant qu’urbaniste je me suis alors interrogée : en quoi les œuvres de science-fiction peuvent constituer une source d’inspiration dans ma manière de concevoir le futur ?
Alors quand Sylvain m’a proposé de faire un entretien avec François Houste sur les liens entre la science-fiction et la ville, j’ai immédiatement accepté. François est consultant à l’agence digitale plan.net, et passionné par la science-fiction. Il est d’ailleurs l'auteur d’un très intéressant recueil de nouvelles qui interrogent la place du numérique dans notre quotidien : Mikrodystopie. Il est aussi à l’origine de cybernetruc, une newsletter dans laquelle il livre ses réflexions sur les liens entre numérique, culture et imaginaire, avec toujours beaucoup de références à des œuvres de science-fiction. Je vous laisse découvrir cet entretien dans le podcast ci-dessous. Bonne écoute !
Camille Tabart (Linkedin)
Pour aller plus loin :
William Gibson - Neuromancien (1984)
William Gibson - Lumière Virtuelle (1993)
Philip K. Dick - Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? (1966) (qui a été adapté au cinéma sous le nom de Blade Runner par Ridley Scott en 1982)
Neal Stephenson - La Samouraï Virtuel (1992)
Beck Chambers - Un Psaume pour les Recyclés Sauvages (2021)
Alain Damasio - Les Furtifs (2019)
Clifford D. Simak – Demain les chiens (1952)
N.K. Jemisin - La Cinquième Saison (2015)
Octavia E. Butler - La Parabole du Semeur (1993)
Bruce Bégout - Los Angeles, Capitale du XXe siècle (2019)

Mar 5, 2024 • 40min
#95 Jérôme Barth · Les chaises de Bryant Park
🪑 Les chaises de Bryant Park
Vous connaissez sans doute les fameuses chaises vertes du Jardin des Tuileries à Paris. C’est tout l’inverse de ces assises indestructibles aux pieds coulés dans le béton que l’on voit émerger un peu partout, mais qui restent en général désespérément vides. Quand on arrive aux Tuileries, on se saisit de sa chaise pour la déplacer au soleil, la tourner vers un comparse ou juste la décaler de quelques centimètres dans une position bien à soi. Libre de toute contrainte, elle est appropriable et se laisse domestiquer. Et ça marche.
Les chaises de Bryant Park à New York sont du même fabricant français, mais d’un autre modèle plus léger. Elles symbolisent la réussite d’un espace public massivement approprié par les habitants, qui l’envahissent au moindre rayon de soleil. Pourtant rien ne destinait ce parc à un tel succès. Pendant les années 1970, c’est au contraire un lieu mal famé fréquenté essentiellement par les trafiquants de drogue.
Le rapport écrit par William H. Whyte en 1979 - que nous publions pour la première fois dans une traduction française - faisait un état des lieux particulièrement sombre. Mais il faisait aussi des propositions qui ont donné lieu à un projet de rénovation qui a transformé ce lieu de perdition en oasis urbaine. Fondé sur un travail d’observation minutieux des usages, il propose de renoncer à des aménagements matériels et esthétiques pour miser sur des ajustements plus ponctuels, et une animation des lieux associé un véritable effort de gestion. Ces chaises qu’il faut déployer, ranger, entretenir ou remplacer en permanence symbolisent l’attention nécessaire pour faire vivre un espace public hors du commun. Les efforts de gestion permettent d’offrir un service de qualité, qui lui-même permet une parfaite appropriation, et l’arrivée du public permet de pacifier les lieux. Le travail de William H. Whyte sur Bryant Park est le point de départ du mouvement du « Placemaking », qui a initié une vague de renouveau des villes d’Amérique du Nord.
Je vous invite à écouter mon échange avec Jérôme Barth, qui a travaillé une quinzaine d’années à Bryant Park, il est aujourd’hui associé de Belleville Placemaking, qui intervient aux États-Unis et au Canada. Et vous pouvez bien sûr commander dès aujourd’hui notre traduction du rapport de William H. Whyte, qui constitue la 4e édition des cahiers de dixit.net.
Je suis Sylvain Grisot, urbaniste/fondateur de dixit.net.
N’hésitez pas à vous abonner à notre newletter sur dixit.net pour ne pas manquer nos prochaines publications, et bonne écoute !
Pour aller plus loin :
Le rapport de William H. Whyte : Revitaliser Bryant Park
Bellville placemaking
Learning from Bryant Park: Revitalizing Cities, Towns, and Public Spaces Relié, Andrew M. Manshel, 2020.

Feb 7, 2024 • 49min
#94 Raphaël Ménard · énergies légères
⛽ Paysages post-carbone
J’avais besoin d’un temps de pause. Nous venions de parcourir le flot de cette histoire de l’apparition des énergies fossiles dans nos vies, de la nécessité d'une bonne dose de sobriété pour nous en passer, mais aussi de développer les alternatives. Mais celles-ci aussi ont des impacts : poids des matériaux, empreinte spatiale, impact sur les paysages… Les chiffres s’alignent sous la forme d’élégants schémas sur les murs du Pavillon de l’Arsenal. Effrayants. Les deux tranches de la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine, c’est une centaine d’hectares et 1,2 million de tonnes. Le barrage de Serre-Ponçon, 2,2 millions. Une éolienne en mer du parc de Saint-Nazaire 2900 tonnes. Les panneaux solaires sur mon toit peut-être 150 kg. L’énergie ne se compte pas qu’en kilowatts et mégawatts, mais aussi en tonnes et en hectares, et apprendre la légèreté ne sera pas si simple.
Alors, cette banquette est la bienvenue, comme l’est ce paysage calme devant moi. Une forme de carte postale à peine animée d’une légère brise qui fait tourner une petite éolienne au profil familier. Nous voilà dans une petite rue, sans doute celle d’un lotissement cheminot des années 1960, au bord de voies ferrées abandonnées. Une drôle de petite voiture mal garée sur le trottoir se recharge par l’entremise d’un câble passé par-dessus la clôture. Derrière elle, une voiture de collection manifestement rétrofitée d’un moteur électrique. Pendant qu'elles patientent, des techniciens déploient un accordéon de panneaux solaires sur les voies. La rue a été blanchie pour réduire l’effet d’îlot de chaleur urbain, tout comme les toits, quand ils n’ont pas été équipés de panneaux solaires. Je suis face à une image d’un banal présent, avec quelques graines de futur qui semblent déjà familières. Un futur possiblement proche où l'énergie s'est faite légère.
C’est un des six paysages post-carbone concoctés par Raphaël Ménard et Olivier Campagne pour cette exposition. Défilent ensuite l’intérieur cosy d’un appartement urbain, une plaine agricole qui cultive son énergie, des toits parisiens adaptés au futur, des éoliennes qui s’intègrent à leur paysage et à la vie des lieux, et même un fleuve qui renoue avec la production. Autant d’instants prospectifs ancrés dans le banal présent qui donnent envie d’y croire. Tout sauf des couvertures de romans de science-fiction, ou des images d'illustration de colloques sur la smartcity. J’en retiens pour ma part l’idée qu’une somme de petites transformations peut déjà faire son effet, pour peu qu’on se donne la peine de s’y mettre, en misant sur quelques principes aussi simples que ces six légèretés qui clôturent le parcours : sobriété, équilibre énergie-matière, simplicité, sols vivants, juste échelle et esthétique post-carbone. Je garde aussi en tête un procédé ingénieux, avec ces cartes postales à peine animées qui nous projettent dans un futur proche, éclairé d’un simple schéma explicatif. Un bon moyen de passer au travers du miroir.
On parcourt cette semaine cette exposition intitulée "énergies légères" avec Raphaël Ménard. Alors bonne visite !
Pour aller plus loin :
https://www.pavillon-arsenal.com/fr/expositions/12805-energies-legeres.html
MacKay, David J.C., Sustainable Energy – Without the Hot Air, Cambridge, UIT Cambridge Ltd., 2009 ; éd. franç. L’Énergie durable. Pas que du vent !, Bruxelles, De Boeck, 2012
Auzanneau, Matthieu, Or noir. La grande histoire du pétrole, Paris, La Découverte, 2015
Kazazian, Thierry, Il y aura l'âge des choses légères - Design et développement durable au quotidien, ed. Victoires, 2003

Jan 31, 2024 • 47min
#93 Louis Henaux · Les maux du logement
🏚️ Les maux du logement
Le mal-logement a de multiples visages. Absence de domicile fixe, difficultés d’accès au logement, insalubrité, bidonvilles, surpeuplement, assignation à résidence, précarité énergétique et de plus en plus climatique… les maux du logement touchent directement plus de 4 millions de personnes en France, et je doute que la Fondation Abbé Pierre nous annonce demain des bonnes nouvelles avec la publication de son rapport annuel. Lutter contre ces maux nécessite des modes d’action très différents, qui touchent bien sûr au concret, mais aussi à l’accompagnement des femmes et des hommes touchés. C’est essentiel, car le logement n’est pas un élément de confort ou un bien comme les autres, c’est la condition d’une bonne santé physique et mentale, de la capacité à travailler, étudier, avoir une vie de famille, alors c’est logiquement devenu un droit depuis peu.
Mais pour que le droit passe de la théorie à la pratique, encore faut-il des logements disponibles. Et sur ce front, la crise ne date pas d’hier, mais elle s’accélère : paupérisation des locataires, inflation du foncier, hausse des coûts de production, crise du financement… L’effondrement de la construction neuve touche aussi violemment les acteurs du logement social qui doivent pourtant répondre aux besoins de 2,6 millions de demandeurs en attente, tout en maintenant à flot un parc fragilisé.
Alors oui, il faut agir.
Beaucoup demandent la nomination d’un ministre du logement, mais j’ai du mal à me persuader que c’est nécessairement la solution. Il y a déjà le risque de ne pas tomber sur le bon cheval (souvenons-nous que la politique de l'architecture dépend du ministère de la Culture), qu’il ou elle soit (à nouveau) impuissant(e), ou même qu’il ou elle donne son nom à un nouveau dispositif de défiscalisation. Mais il est par contre certain qu’il nous faut une vraie politique du logement, et pas une qui commence par remettre en cause l’article 55 de la loi SRU. C’est lui qui a créé il y a plus de vingt ans une pincée de solidarité territoriale en responsabilisant les communes dans la production de logement social. Ce n’est pas un simple article ni même un symbole, c’est un socle de notre vie collective. Y toucher est « une faute morale » pour Emmanuelle Cosse, et pour citer directement les mots de Manuel Domergue : « On a fait la loi SRU pour les communes rétives à accueillir des ménages pauvres et mal logés. C’est donc là une voie d’eau très importante, qui va autoriser à accueillir, sur le quota du logement social, des classes moyennes, voire des classes moyennes supérieures. »
Mais puisque les débuts de réponses politiques esquissés à la crise sont singulièrement décevants, c’est peut-être que la question n’était pas claire (gardons l’option optimiste). Alors, allons faire le tour des maux du logement avec Louis Henaux, directeur logement d’Habitat & Humanisme, et explorons avec lui quelques pistes d’action, car il y en a de bonnes.
Pour aller plus loin :
Edgar Pisani, Utopie foncière, Editions du Linteau.
Louis Hénaux, Nouvelle économie foncière, https://issuu.com/louishenaux/docs/230301_article_nouvelle_conomie_fonci_re

Jan 17, 2024 • 25min
#92 Aurore Magnin et Thomas Maréchal · Partie Commune
La rue est calme, et on ne peut pas dire qu’elle soit encombrée par les appuis vélos. Émerge dans le paysage une petite copropriété d’une vingtaine d’appartements, tout droit venue des années 1960. Les volumes sont simples, le toit plat, le parking souterrain et le gazon bien tondu. Le béton est d’époque et de qualité, les murs peu encombrés d’isolants et le simple vitrage n’a pas encore complètement été exterminé.
Il paraît qu’ici on s’imagine accueillir quelques voisins en plus sur le toit, on se voit bien se promener dans des espaces verts luxuriants dotés d’un potager prolifique, ajouter de nouvelles façades pour donner un coup de jeune, dédier un bout de parking aux vélos et au bricolage et discuter de la gestion du composteur collectif dans la toute nouvelle salle commune. Ce ne sont à ce jour que des idées en l’air, et rien ne dit que ce soit le futur que choisiront les habitants, mais il se trame bel et bien quelque chose.
Il faut dire que le nouveau syndic de la copropriété ne s’est pas cantonné à mettre à jour les coordonnées bancaires de chacun et à changer le logo des notes sur les encombrants punaisées dans la cage d’escalier. Mise à plat des contrats pour trouver des prestataires conscients, identification des potentiels de mutualisation et de valorisation des espaces communs, lancement d’une réflexion globale sur l’adaptation climatique de la copropriété… Les chantiers ouverts sont nombreux, et touchent la structure bâtie comme la vie quotidienne de tous les habitants, et pas seulement celle des propriétaires.
Tout ça sent le début d’une transition de proximité. Vous savez, celle dont on a besoin, celle qui irait au fond des choses, et qui changerait vraiment la donne, cage d’escalier par cage d’escalier. Celle qui parlerait autant de carbone que d’habitants et de partage. Le chantier de la métamorphose de ces copropriétés qui logent un tiers des Français est vaste, et à peine engagé. Intensification des usages, végétalisation, densification, accueil des mobilités douces, décarbonation, adaptation au climat qui change et résilience aux nouveaux risques… Chacune doit faire sa mue pour entrer vraiment dans le 21e siècle.
Alors Aurore Magnin et Thomas Maréchal ont décidé de s’y mettre, en créant « Partie Commune ». Il y a des moyens plus attrayants pour changer le monde que de créer un syndic de copropriété, mais à bien y réfléchir leur piste mérite d’être suivie. Car en abordant le métier sous l’angle des liens plus que de la gestion, en parlant des habitants avant de parler du bâti, ils sont dans le concret et limitent le risque de brasser du vent. Il n’y a plus qu’à miser sur le fait qu’ils grandissent vite, et que cette idée de syndic d’intérêt général essaime ailleurs. Alors on visite aujourd’hui avec eux cette copropriété qui se rêve une seconde vie. Bonne écoute.
– Sylvain Grisot (Linkedin)
Pour aller plus loin :
Le Syndic Partie Commune : https://syndicpartiecommune.fr/
L'association RELEVE : https://www.helloasso.com/associations/association-de-prefiguration-releve