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Ainsi va la ville

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Feb 28, 2020 • 0sec

#23 – La grève des éboueurs

Contexte : Récemment le travail des éboueurs s’est rendu visible. Opposés au projet de réforme des retraites, un grand nombre d’éboueurs mais également des égoutiers, fossoyeurs, agents techniques ou encadrants des directions de la propreté ou des espaces verts ont mené une grève de plusieurs semaines dans de nombreuses villes françaises, notamment Paris et Marseille. À l’instar des égoutiers dont l’espérance de vie est réduite de dix-sept ans par rapport à la moyenne nationale, les éboueurs ont une espérance de vie réduite de sept ans. Le projet de réforme des retraites du gouvernement prévoit de supprimer la reconnaissance de la pénibilité de leurs métiers qui leur permet actuellement de prendre une retraite anticipée. La production de déchets est au cœur du fonctionnement urbain. Chaque année en France, un habitant produit 354 kg d’ordures ménagères. Les calculs sont réalisés par l’Ademe à partir des tonnages des poubelles des ménages (hors déchets verts) collectées par les collectivités locales. On peut aussi, comme le fait Eurostat afin d’effectuer des comparaisons internationales, évaluer la quantité de déchets municipaux par habitant. La quantité produite monte alors à 536 kg par an et intègre en plus des déchets des ménages, ceux des collectivités ainsi qu’une partie des déchets d’activités économiques. Mais ces chiffres ne sont que la partie émergée de l’iceberg de déchets produits chaque année : en prenant en compte les déchets professionnels (BTP, industrie, agriculture, activités de soin), on atteint 13,8 tonnes de déchets produits par an et par habitant. En France, deux tiers des déchets sont détruits ou entassés pour la plupart (incinération et décharges) alors que 34% sont recyclés ou transformés par une gestion biologique (compostage/méthanisation des déchets organiques). La gestion des déchets est un service public. En 1884, le préfet Eugène-René Poubelle impose aux Parisiens de collecter leurs déchets ménagers dans un récipient, qui marque le début de la collecte à grande échelle, faite sous l’égide de l’État et des collectivités. La gestion des déchets en France est déterminée par l’État, qui en fixe la politique et le cadre réglementaire, en accord avec la directive européenne 2008/98/CE. Cette gestion relève des collectivités territoriales. Selon le type de déchet, cette gestion peut être de la compétence de la commune, de l’EPCI, du département, de la Région (qui doit maintenant produire un PRPGD) ou de l’État (déchets militaires et nucléaires notamment). Mais va-t-elle rester un service public dans les années à venir ? Aujourd’hui, le métier d’éboueurs est particulièrement « invisibilisé » et soumis à de nombreux risques. Le groupe de rap La Triple XL est composé de trois agents de la propreté de la ville de Paris, Alain (Brady Boy), Wilfrid (Big Wil) et Christophe (Little Chris). Ils utilisent les mots et la musique pour décrire, ensemble, leur quotidien et leur rôle essentiel de la ville actuelle. Ainsi va la ville les écoute, et leur donne la parole. À l’oreille : La triple XL – La milice verte de Paname La triple XL – Oh mon balai Et : Magazine Infrarouge, France 2, 11 février 2020, “Des ordures et des hommes”, réalisé par Mireille Dumas et Damien Vercaemer Vidéo promotionnelle de la Mairie de Paris
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Feb 7, 2020 • 0sec

#22 – Construire et partager la ville : l’urbanisme coopératif du Bauhaus à aujourd’hui

Émission enregistrée le 7 février 2020 Invitée : Elke Mittmann, historienne de l’architecture, enseignante à l’ENSA Strasbourg et directrice de la Maison de l’architecture de la Région Centre Val de Loire Contexte : « Bâtir et donner forme ne sont qu’une seule et même chose : un phénomène social. Comme “école supérieure de la création”, le Bauhaus de Dessau est un phénomène social. Il n’est pas un phénomène artistique. Comme créateurs, notre activité est conditionnée par la société. C’est elle qui délimite nos tâches. N’est-ce pas la société qui exige aujourd’hui en Allemagne des milliers d’écoles primaires, de jardins d’enfants, de maisons du peuple, des centaines de milliers de logements sociaux, des millions de meubles populaires ? […] Le nouvel enseignement de l’architecture vise à connaître l’existence. Comme enseignement de la création, il est le cantique des cantiques de l’harmonie. Comme sociologie, il est une stratégie de l’équilibre. Des forces de coopération et des forces individuelles. Dans le communauté de vie d’un peuple. Cet enseignement de l’architecture n’est pas l’enseignement d’un style. Il n’est pas un système constructiviste, ni la théorie miraculeuse de la technique. Il étudie systématiquement la manière dont la vie se construit, éclairant d’égale façon les nécessités du physique, du psychique, de l’économie et de la vie matérielle. […] Bâtir en décidant de son destin, c’est faire l’expérience consciente du paysage. Comme concepteurs, nous accomplissons la destinée du paysage. » Hannes Meyer, « Bauhaus et société », revue du Bauhaus, 1929. À l’oreille : Kraftwer, Das Model Nina Hagen interprète deux extraits de L’Opéra de Quat’sous de Kurt Weill Des liens en accès ouvert pour aller plus loin : La notice Wikipedia sur Le Bauhaus Hannes Meyer sur Wikipedia et le site du centenaire du Bauhaus La notice Wikipedia de Ernst May Architecture et Politique / la République de Weimar 1919-1933 Émission Transformer le Bauhaus de nos amis de Radio Grenouille Elsa Vonau, La fabrique de l’urbanisme
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Jan 24, 2020 • 59min

#19 – Comment vont les villes moyennes ?

Contexte : Dans cet épisode, nous interrogeons les villes moyennes françaises, que l’on entend peu, avec le géographe et urbaniste Aurélien Delpirou. Il est maître de conférences à l’École d’Urbanisme de Paris, (Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne) et chercheur au sein du laboratoire Lab’Urba. Ses travaux portent notamment sur l’action publique en matière d’aménagement et d’urbanisme, tant dans les grandes métropoles européennes que dans les villes moyennes françaises. Quand on parle de la ville, on pense principalement aux grandes agglomérations. Pourtant 20 % de la population française et 30 % des citadins de l’hexagone habitent une ville moyenne. Qu’est-ce que ces villes moyennes ? Quelles sont leurs spécificités ? Sont-elles la part reléguée d’une société à deux vitesses dont les habitants sont les perdants ou bien sont-elles des lieux de vie restés singuliers ? Quelle marge reste-t-il pour les pouvoirs publics, et plus généralement pour le pouvoir d’agir des uns et des autres, dans des villes moyennes largement délaissées par les investisseurs ? À l’oreille : Mickey 3D – Montluçon Orelsan – Dans ma ville on traîne Jacques Brel – Vesoul Ressources : Aurélien Delpirou, « Action cœur de ville : une réponse en trompe-l’œil à la crise des villes moyennes ? », Métropolitiques, 28 octobre 2019. Aurélien Delpirou, La couleur des gilets jaunes, La vie des idées, décembre 2018. Aurélien Delpirou, Dossier « Villes moyennes », Métropolitiques, 4 décembre 2013. Guillaume Erner et Aurélien Delpirou, la question du jour, Villes moyennes : comment redynamiser les centres-villes ?, France Culture, 20/03/2019
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Jan 24, 2020 • 0sec

#20 – Google va-t-il tuer nos villes ?

Contexte : Dans cet épisode, nous échangeons avec l’agence de design Vraiment Vraiment, suite à la publication de leur texte Espace public, Google a les moyens de tout gâcher.. Romain Beaucher et Alexandre Mussche, dont l’ambition est de faire du design d’intérêt général, nous racontent l’impact et les risques de la collecte des données opérée par Google sur les expériences urbaines des usagers de leurs services. Au détour de leur analyse, les notions “d’espace public” et les formes urbaines telles que les “façades” et les “centres” sont considérablement reléguées. Introduction : “C’était un café efficace, disons. Un café qui, comme la plupart, depuis que la ville avait été privatisée, n’était plus du tout un lieu de braillades, de petits vieux, d’échanges ou de cuites complices mais un ersatz de bureau pour travailleurs auto-entrepris. Un filflow comme ils disaient : Free Office For Liberal Open Worker. Personne ne prenait plus la peine de s’y regarder, d’y tenter un flirt ou un tchin : on cobossait sans même se voir, le brightphone pluggé dans le hub de la table, le plateau relevé à 60° servant d’écran et dressant, de toute façon, un muret sans appel entre le client et le monde, encore redoublé par le cocon du casque. La convivialité 2040.” “Ils acceptent parce que nous rêvons tous d’un monde bienveillant, attentif à nous. Un monde qui prenne soin de nos esprits et de nos corps stressés, qui nous protège et nous choie, nous aide et corrige nos erreurs, qui nous filtre l’environnement et ses dangers. Un monde qui s’efforce d’aménager un technococon pour notre bien-être. L’intelligence ambiante pourvoit à ça. Elle nous écoute et elle nous répond. Elle courbe cette bulle autour de nos solitudes. Elle la tapisse d’objets et d’interfaces cools. Bien sûr, elle en profite pour nous espionner jusqu’au slip et pour nous manipuler jusqu’à la moelle ! Mais au moins, elle s’occupe de nous, ce que plus personne ne fait vraiment… C’est un cercle vicieux.” « Non, ce qui nous définit, plus profondément, est la quête du contrôle. Externe et interne. Contrôle de notre corps, de notre espace, de nos ressources… Contrôle panique et raisonnée de l’altérité : des autres prédateurs, des maladies qui ne sont que des prédateurs plus petits ; contrôle de l’accès à la nourriture, contrôle des déchets, contrôle du climat, contrôle à toute agression probable, possible, plausible ! Évidemment, nous avons échoué, souvent, en partie, tout le temps. Mais la quête s’est poursuivie et s’est affinée, à mesure que les menaces externes reculaient. Dans un univers désormais anthropisé à l’extrême, comme le sont nos villes occidentales, quelle était la dernière menace résiduelle, le dernier élément à maîtriser pour atteindre la sérénité ? Sinon nos semblables ? » Alors qu’est-ce qu’on fait ? » Alain Damasio, Les Furtifs, 2019, éd. La Volte À l’oreille : John Surman – Edges of illusion Chassol – Madame Étienne Lise Rone feat Alain Damasio – Bora Vocal | Live Plus Près De Toi Pour aller plus loin : I. Joseph, Le passant considérable, essai sur la dispersion de l’espace public, 1984. Le plan de Nolli Alain Damasio, Yan Pechin – Entrer Dans La Couleur Phonophore, l’univers sonore des Furtifs d’Alain Damasio
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Jan 10, 2020 • 0sec

#18 – La ville franchisée, 20 ans plus tard

Avec David Mangin, architecte et urbaniste, enseignant, Grand Prix de l’urbanisme 2008. Contexte : “En matière d’urbanisme commercial, nous partons tous avec des idées reçues. Notamment celle selon laquelle la question du commerce et des «entrées de villes » serait simple si elle n’était qu’affaire d’esthétique ; mais c’est un peu plus compliqué que cela. Évitons les malentendus. Le débat n’est pas entre une “France moche” et le reste du monde ; la voiture contre les transports en commun ; la “boîte à chaussures” contre les gestes architecturaux. L’enjeu relève plutôt d’un mode de ville qui n’exclurait pas d’autres modes d’usage et de déplacement qui n’injurierait pas l’avenir, y compris celui du commerce lui‐même. Il optimiserait ainsi les infrastructures existantes. Mais pour cela il faut en comprendre les mécanismes.” David Mangin, « 10 idées reçues sur l’urbanisme commercial… et quelques pistes pour en sortir », in Cristina Garcez et David Mangin (dir.), Du Far West à la ville. L’urbanisme commercial en questions, éd. Parenthèses, 2014. “Le titre de “La ville franchisée, formes et structures de la ville contemporaine” a été préféré à d’autres, tels “La ville mondialisée”, “La ville sectorisée”, “De l’îlot au secteur” ou, plus simplement, “La ville d’aujourd’hui” pour son sens double. D’abord, bien sûr, celui des “franchises commerciales”, signes ostensibles des transformations urbaines contemporaines en périphérie mais aussi dans les centres et les faubourgs. Enseignes reproductibles en réseaux (c’est leur objectif), les franchises envahissent le paysage et le vocabulaire. On ne se donne plus rendez-vous au carrefour mais à Carrefour; on trouve ses repères dans un paysage jalonné de marques, dont dès le plus jeune âge, on connaît les couleurs, les produits et parfois même les concepts, marketing oblige. Même si les franchises, au sens strictement juridique du terme, ne représentent qu’un pourcentage relativement modeste du réseau commercial actuel, elles sont pourtant omniprésentes. Mais surtout nous intéresse le second sens, celui de “franchises territoriales”, de “franchises domaniales”. Le terme franchise s’identifiait au Moyen Âge à l’idée de territoire libre, faisant l’objet d’une exception juridique et politique : “les franchises d’un pays, d’une ville, les droits que possède un pays, une ville et qui limitent l’autorité souveraine” (Littré). Cette définition paraît résumer au mieux la situation contemporaine. Avec la montée en puissance du néo-libéralisme, la franchise contemporaine n’est plus celle des universités et autres asiles ecclésiastiques. Les territoires franchisés d’aujourd’hui sont de grandes emprises privées ou publiques, gardées, accessibles seulement sous conditions.” David Mangin, La ville franchisée. Formes et structures de la ville contemporaine, La Villette, 2004 À l’oreille : Rufus Wainwright – “Going to a town” Rachid Taha (version accompagnée de Catherine Ringer) – “Ya Rayah” Autres références : Éric Charmes, La ville émiettée. Essai sur la clubbisation de la vie urbaine, PUF, 2011. Jacques Donzelot, La ville à trois vitesses : gentrification, relégation, péri-urbanisation, La Villette, 2005 David Mangin, Paris/Babel. Une mégapole européenne, La Villette, 2013 David Mangin, La ville passante (sous la direction d’Ariella Masboungi), éd. Parenthèses, 2008
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Dec 13, 2019 • 60min

#21 – Vie et mort d’un grand projet : après Europacity, quel avenir pour le triangle de Gonesse ?

Invités : Stéphane Tonnelat, sociologue, co-rédacteur en chef de la revue en ligne Métropolitiques Jean-Yves Souben, membre élu du conseil municipal du Blanc-Mesnil, ancien proviseur de lycée Contexte : Europe, ville. Qu’est-ce qu’une ville européenne ? Les rapports de force entre intérêts publics et intérêts privés n’ont cessé de produire des effets sur les formes de nos villes. Ouvrons une Histoire de l’Europe urbaine : il est question de fondations et d’extensions, d’économie politique et de finances, de droit de propriété, d’organisation de l’espace en fonction des ressources locales et de proximité de groupes sociaux hétérogènes, aux intérêts souvents divergents; mais aussi d’administration, de plans et de violence, de commerce, de culture. Depuis un siècle et demi, l’urbanisme a rêvé de fabriquer des morceaux de villes, voire de transformer des villes entières, en concevant des projets urbains : des grands travaux de Paris sous le Second Empire aux villes nouvelles de la Cinquième République, l’urbanisme à grande échelle à la française ne s’est jamais réalisé sans l’engagement très prononcé de l’État. À l’époque d’Haussmann, “Europe”, avant de devenir une station de métro, c’est tout un quartier de l’Ouest parisien que l’on réorganise et renomme, en donnant des noms de grandes villes européennes à ses rues élargies : rue de Londres, rue d’Anvers, de Liège et d’Amsterdam, rue de Rome ; rues de Naples, d’Édimbourg, de Madrid, de Turin, de Bucarest et de Moscou… comme une carte du monde en miniature, glissée dans le plan de la grande ville industrielle. Mais au vingt-et-unième siècle, les conditions ont peut-être changé. L’Europe ne nourrit plus les mêmes aspirations et les mêmes rêves, et la fabrique de la ville ne se joue plus à l’échelle d’une seule agglomération, même géante, ni d’un seul pays ou d’un seul continent. Comme si l’idée d’une ville européenne, avec ses singularités, appartenait désormais au passé. Ainsi va la ville s’intéresse aujourd’hui aux transformations en cours dans la métropole parisienne, et plus précisément à un des chantiers du Grand Paris récemment abandonné : EuropaCity. Vous avez aimé Eurodisney, devenu Disneyland Paris, et son cousin germain, le vaste centre commercial Val d’Europe ? Alors le projet EuropaCity vous aurait sans doute plu. Mais depuis le 7 novembre 2019, il n’est plus d’actualité. Qu’était-ce au juste que ce projet ? Quelles leçons pouvons-nous en tirer pour l’avenir ? Des liens en accès ouvert pour aller plus loin : Europa City Alice Le Roy, « Terres fertiles contre projet stérile », Métropolitiques, octobre 2019 La page personnelle de Stéphane Tonnelat
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Nov 29, 2019 • 0sec

#17 – Les futurs de Marseille : les contradictions d’Euroméditerranée

Contexte : Que vient faire une opération d’intérêt national dans la deuxième ville de France – qui est aussi la première, puisqu’elle est la plus ancienne : Marseille fut fondée, dit-on, en 600 avant Jésus-Christ ? Ce n’est un secret pour personne : la cité phocéenne vit aujourd’hui des heures très difficiles. Après les 8 morts du 5 novembre 2018 dans l’effondrement de deux immeubles, les arrêtés de mise en péril se sont multipliés et ont conduit à l’évacuation de plusieurs centaines d’immeubles vétustes. Des milliers de personnes, locataires ou propriétaires, attendent toujours de pouvoir réintégrer leurs logements, pendant que les expulsions continuent dans les quartiers du centre-ville comme de la périphérie. La répression policière des nombreuses manifestations qui ont suivi a donné lieu à des violences et à de nouvelles contestations – en particulier après la mort de Zineb Redouane, une octogénaire blessée chez elle lors d’une opération policière. C’est dans ce climat très tendu que la campagne des élections municipales a commencé ; c’est aussi dans ce climat que nous nous rendons aujourd’hui à Marseille, en tâchant d’observer quelques enjeux de la fabrique de la ville. Cet épisode aborde la transformation urbaine à partir du point de vue d’une enquête de terrain sur le principal projet de rénovation en cours ici : Euroméditerranée. Depuis vingt-cinq ans, une opération gigantesque dite d’intérêt national, attire des capitaux sur la métropole, et légitime des transformations rapides de secteurs entiers de la ville, au point d’en métamorphoser radicalement le paysage : la rénovation du Vieux-Port et de ses accès en ont fait un vaste secteur piétonnier, l’arrivée du tram a accompagné la restauration de la rue de la République, le front de mer a été redessiné autour du Fort Saint-Jean et des nouveaux bâtiments du MUCEM et de la Villa Méditerranée ; après la démolition de la passerelle littorale de l’A55, de grands travaux sont en cours sur les infrastructures de transport comme les tunnels, les autoroutes, les accès à la gare maritime, l’augmentation des surfaces de parking ; les anciens Docks du quartier de la Joliette sont devenus des centres commerciaux, d’immenses tours de bureaux sont sorties de terre et ont changé les horizons de Marseille. Ces travaux relancent une partie de l’économie, à commencer par ceux du BTP et de l’aménagement urbain. Les commerces et les bureaux, lorsqu’ils sont occupés, attirent de nouvelles entreprises. Mais d’autres commerces, d’autres activités continuent de péricliter. La question se pose : après des décennies de grande fragilité économique et de précarité sociale, la ville avait-elle besoin d’investissements massifs de ce type ? À qui s’adressent de tels chantiers ? Les aménagements en cours se présentent comme “pensés et mis en œuvre pour les habitants”. Mais quels rapports concrets peut-on observer entre les travailleurs de ce projet (on peut citer par exemple les urbanistes, les économistes, les architectes) et les habitants des quartiers concernés ? Comment comprendre les contradictions et les conflits qui émergent autour de ces projets ? Qu’est-ce, au quotidien, que de travailler pour Euroméditerranée ? Autant de questions que nous abordons avec notre invitée, Marie Beschon, qui vient de soutenir une thèse d’anthropologie urbaine portant sur le projet Euroméditerranée à Marseille. À l’oreille : Keny Arkana – Capitale de la rupture La Canaille – Sale Boulot Polyphonic System – A De Matin Pour aller plus loin : Marcel Roncayolo, La ville et ses territoires, Gallimard, 1990. Marcel Roncayolo, L’imaginaire de Marseille. Port Ville Pôle, CCI Marseille, 1990. Réédition en 2014 par l’ENS Lyon Alessi Dell’Umbria, Histoire universelle de Marseille, de l’an mil à nos jours, Agone, 2013. Pierre-Paul Zalio, « Urbanités marseillaises », Enquête [En ligne], 4 | 1996, mis en ligne le 12 juillet 2013 Politis, 2013, Euroméditerranée ou la ville confisquée, reportage, 3’43, article [En ligne] publié le 10 janvier 2013 Primitivi, Regarde à vue, Collectif On se laisse pas faire, 2013, On se laisse pas faire, documentaire produit par CCKB, 27’38
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Oct 30, 2019 • 0sec

#16 – Que sont devenus les mots de la ville ? Une pathologie de la ville ordinaire

Invité : Éric Chauvier, anthropologue et écrivain. Il a publié de nombreux ouvrages à partir de ses enquêtes urbaines et périurbaines, dont Contre Télérama (2011), Les mots sans les choses (2014) et Les nouvelles métropoles du désir (2016). Contexte : Dans les rues de nos villes, qu’elles soient petites, moyennes ou grandes, centrales ou périphériques, les mots sont partout. Les voix robotiques ou les conversations entre passants, les slogans publicitaires des écrans, des affiches et des vitrines, les petites annonces scotchées aux feux rouges, les graffiti chromés sous les ponts, la une des journaux et des magazines, les pochoirs sur le sol et les tags sur les murs. Les mots sont partout dans la ville, et cette omniprésence ne date pas d’hier. Le langage, verbal et non verbal, fait exister la vie urbaine qui repose sur d’innombrables formes de communication symbolique. Écrivains naturalistes dans la grande ville industrielle, mythe poétique des villes tentaculaires, roman policier et film noir, rap commercial, chants militants, imagerie et contre-imagerie des banlieues, séries télé sur la vie pavillonnaire… une longue histoire littéraire et artistique a forgé ce qu’on appelle parfois des cultures urbaines, à la rencontre des traditions populaires et des industries culturelles. Face à ce flot de paroles et d’images, les chercheurs en sciences sociales, depuis un siècle environ, se sont mis à l’écoute des situations urbaines ordinaires. Dans leurs enquêtes de terrain, sociologues et anthropologues observent et transcrivent les conversations quotidiennes, les parlers populaires, les discours politiques, les propos médiatiques. Auprès des citadins, ils recueillent des récits de vie dans des entretiens et remarquent les silences, les accents, les clichés, les résistances. À travers les voix des habitants, des travailleurs ou des passants, ils tentent de faire parler la ville. Cette écoute des autres ne va pas de soi, elle rencontre même des obstacles. Des raccourcis péremptoires, des formulations standards recouvrent les expériences vécues. Parfois, les mots semblent vides et nous ne savons plus bien nommer les choses. Ville globale, bouge ta ville, éco-quartier, happy hour, réinventer, zone touristique, action cœur de ville, jeunes de cité, le pavillon de vos rêves, fan zone, marché des artisans créateurs, fête des voisins, ambiance start-up, coulée verte, résidence connectée, smart city… Le malaise grandit, le trouble s’étend. Qu’est-il arrivé aux mots de la ville, pour qu’ils semblent avoir perdu leur sens ? Difficile de parler avec justesse de la vie urbaine quand la langue s’éloigne de nos expériences. Dans les différents lieux de la ville contemporaine, les mots n’ont-ils pas remplacé les choses ? Bibliographie de l’invité évoquée pendant l’émission : Anthropologie, Allia, 2006 Si l’enfant ne réagit pas, Allia, 2008 Contre Télérama, Allia, 2011 Anthropologie de l’ordinaire. Une conversion du regard, Anacharsis, 2011 Les mots sans les choses, Allia, 2014 Les nouvelles métropoles du désir, Allia, 2016 La petite ville, éd. Amsterdam, 2017 Le revenant, Allia, 2018. Extrait audiovisuel : Archive : “Terres périurbaines”, 1999. Institut national de l’audiovisuel. Pour aller plus loin, autres références citées : Michel de Certeau (1925-1986), prêtre et historien : L’invention du quotidien, 1. Arts de faire, 1e partie, « Une culture très ordinaire », 1990, rééd. Gallimard, 2002. La possession de Loudun, présenté par Michel de Certeau, coll. « Archives », n° 37, éd. Julliard, 1970. Philip K. Dick (1928-1982), auteur de science-fiction John Carpenter (1948-), La nuit des masques Harold Garfinkel (1917-2001), sociologue américain Charles Baudelaire (1821-1867), Les Fleurs du mal Charles Baudelaire (1821-1867), Le Spleen de Paris À l’oreille : PNL, « Le monde ou rien », 2015 Booba, « Pitbull », 2006 Lou Reed & John Cale, « Small Town », 1990
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Oct 25, 2019 • 0sec

#14 – La fabrique de la petite ville : entre les mains du maire

Invité : Bruno Ricard, maire de Lanvallay (Côtes d’Armor) Contexte : Il reste la campagne. Face aux métropoles, aux grandes villes des nouvelles régions, reste la campagne. Villes moyennes et petites villes se succèdent, le long des autoroutes et des voies ferrées. Elles empruntent leur nom à une mythologie dépassée, noms de pays, de régions naturelles, d’anciennes provinces. Les a-t-on rêvées ? Nous disent-elles encore quelque chose ? Plein Ouest, Alençon, Mayenne, Fougères, Dinan, Lanvallay. Chaque année, les bourgs s’étendent, accueillent, construisent. L’urbanisme quotidien se situe là encore plus qu’ailleurs, dans ce décor qui change si vite qu’on ne le voit pas. L’arbre est tombé, le champ est drainé, nivelé, aménagé, loti. Demain, trente nouvelles familles s’installeront bientôt. Qui seront-ils, ces nouveaux habitants venus d’autres contrées, d’autres campagnes, peut-être même venus de la métropole voisine ? On entend parler de centre-bourgs, de nouvelles ruralités, d’urbanisme promotionnel, faut-il également parler d’écologie, d’agriculture, de petite enfance et d’âge avancé ? Depuis les premières lois des années 1980, la décentralisation fait son œuvre, tandis que s’accomplissent choix résidentiels et économies urbaines. Ici comme ailleurs, les villes, si petites soient-elles, se transforment. Et c’est auprès de celles et ceux qui restent vent debout, dans le millefeuille des territoires qui ne cesse d’impliquer de nouveaux acteurs, auprès d’eux donc, qu’il faudrait commencer à regarder, à ouvrir les yeux sur ces mécanismes, ces processus qui fabriquent l’espace de vie quotidien de bon nombre d’habitants. D’ailleurs, selon l’INSEE en 2017, les petites communes, faisant plus souvent partie des couronnes des pôles urbains, ont une croissance démographique supérieure à la tendance nationale, supérieures aux métropoles, selon un phénomène de périurbanisation qu’il faut apprendre à regarder de plus près, de l’intérieur. Justement auprès de celles et ceux qui bientôt, remettront leur mandat en jeu. Auprès d’électeurs qui, après 6 ans de projet municipal, auront peut-être grandi, vieilli, déménagé, changé. 15 et 22 mars 2020 : il reste la campagne… Extraits de films : Éric Rohmer, Les métamorphoses du paysage, Vers l’unité du monde / L’ère industrielle, film documentaire, 1964 Éric Rohmer, L’arbre, le maire et la médiathèque, film de fiction, 1993 Extraits musicaux : Fito Paez, “Tumbas de la Gloria”, 1993, Argentine Erik Marchand, directeur de la Kreiz Breizh Akademi, Bretagne
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Oct 18, 2019 • 0sec

#15 – Le promoteur immobilier, une espèce utile ?

Contexte : « Vendons celui-là : c’est un terrain à bâtir », avait dit Quinto. Ce à quoi sa mère avait répondu : « C’est ça, et mes calcéolaires… où vais-je les transplanter ? Je n’ai plus une seule place dans tout le jardin. Et les pittosporums, qui sont déjà si grands ? Sans parler de l’espalier de plumbago, qui se perdrait… Et puis (elle s’était arrêtée comme frappée par une crainte qu’elle n’avait pas envisagée), le terrain vendu, s’ils voulaient y bâtir ? » Et se présenta à ses yeux la muraille grise de ciment plongeant dans le vert du jardin et le transformant en un fond de cour froid, en un puits sans lumière. « Bien sûr qu’ils vont bâtir ! avait dit Quinto avec emportement. C’est bien pour cela que nous le vendons ! Si ce n’était pas un terrain à bâtir, personne ne l’achèterait ! » Mais trouver un entrepreneur qui voulût l’acheter ne fut pas une mince affaire. Les entreprises cherchaient de nouvelles zones, près de la mer, avec une vue dégagée ; les maisons étaient déjà trop serrées aux alentours […]. Le marché de l’immobilier donnait d’ailleurs des signes de saturation, pour l’été à venir on prévoyait déjà un léger fléchissement de la demande, deux ou trois entreprises qui avaient eu trop d’appétit furent englouties dans les traites et firent faillite. […] Les mois passaient, un an passa et on n’avait pas encore trouvé d’acheteur. » Italo Calvino, La spéculation immobilière, édition Gallimard, 2013. Invité : Paul Jarquin, PDG de REI Habitat et président de l’interprofession Forêt-Bois d’Ile-de-France À l’oreille : Daft punk – Revolution 909 Tupac – Do for love

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