Transitions Urbaines, par dixit.net

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Oct 10, 2023 • 1h 13min

#87 Emmanuel Bonnet · Avec les territoires et les organisations sentinelles

🌨️ Où est la neige chez vous ? Toutes nos organisations sont des stations de sports d’hiver de moyenne montagne. Collectivités, aménageurs, bailleurs sociaux, promoteurs, agences d’architecture, bureaux d’études… nous avons tous notre propre or blanc, cette ressource vitale dont nous dépendons sans même nous en apercevoir. La neige, le foncier agricole, le béton, la logistique mondialisée, l’argent pas cher, la mobilité automobile, l’eau, la vue sur la mer, les étés joyeux sont autant d’acquis, d’évidences, des filons inépuisables. Des neiges éternelles. Mais entre les crises d’aujourd’hui et les orages qui grondent au loin, impossible de faire encore semblant d’y croire. C’est pourtant maintenant qu’il faut faire le choix entre acheter une nouvelle paire de canons à neige pour gagner du temps, ou commencer à penser à la suite. Alors, et vous, « où est la neige chez vous ? » Répondre à cette question, c’est sortir de l’aveuglement et du déni, et commencer à vivre avec le vertige. « Le vertige, c’est de sentir que malgré les transitions dont on parle, on continue à mettre en œuvre un modèle qui n’est pas tenable » m’expliquait il y a peu un élu local. C’est la hauteur des enjeux qui provoque le vertige, comme pour cet entrepreneur déjà très engagé, confronté aux mauvaises nouvelles du monde : « je croyais que je savais, mais je ne savais pas ». C’est aussi la réaction de cette technicienne face à une équation carbone insoluble : « On ne sait vraiment pas comment on peut y arriver ». Le vertige, c’est la somme de la conscience de l’ampleur des changements à mener, de l’importance de nos responsabilités et de l’incertitude sur le chemin à suivre. Et ce n’est pas qu’une étape inconfortable du processus. C’est un état dans lequel nous devons apprendre à vivre durablement, tout en continuant d’avancer. Nous allons nous y acclimater, car nous ne pouvons ni conserver le cap ni attendre l’effondrement.  « Où est la neige chez vous ? » Cette question, c'est celle que pose souvent Emmanuel Bonnet dans ses interventions. Enseignant-chercheur à l’ESC Clermont Business School, et membre du laboratoire CleRMa, il travaille à la fois dans des stations de sport d'hiver qui s'inventent un futur au-delà de la neige et dans des organisations qui s'engagent dans leur redirection.  Un entretien dont nous n'avons pas fini de suivre les pistes.  Je suis Sylvain Grisot, urbaniste fondateur de dixit.net, bienvenue sur notre podcast. Et bonne écoute ! Pour retrouver tous nos articles et nos podcasts, rdv sur dixit.net ! Un podcast qui bénéficie du soutien de l'ADEME.
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Oct 3, 2023 • 42min

#86 Mathieu Petite · Grand Genève : visions transfrontalières

Genève ce n’est pas qu’un jet d’eau, le siège d’institutions internationales et de quelques banques. C’est un des territoires les plus dynamiques d’Europe, et les échos de son développement dépassent largement le canton. L’agglomération compte plus d’un million d’habitants, et les tensions métropolitaines sont exacerbées par la frontière, avec des emplois qui se concentrent dans le canton de Genève, et les logements en France. Le besoin de structurer le territoire ne date pas d’hier, et la collaboration transfrontalière a abouti à un projet d’agglomération au milieu des années 2000. Cette collaboration singulière porte désormais le nom de Grand Genève et couvre plus de 200 communes et 2000 km2 entre la Suisse et la France. Une nouvelle étape s’engage avec l’élaboration de la « Vision territoriale transfrontalière 2050 ». Ce n’est pas un document réglementaire, mais un processus de dialogue qui doit permettre de fixer un cap commun. Les territoires impliqués prendront ensuite le soin de le traduire dans leurs documents réglementaires. Au vu de l’ampleur des enjeux de transition, c’est un renouvellement complet de la stratégie qui s’engage, avec comme donnée d’entrée l’arrivée attendue de 300 à 400 000 habitantes et habitants en plus d’ici 2050. Mais les documents de travail comme les échanges témoignent d’un changement d’époque. Car il n’y a pas que la jeune génération qui vit l’angoisse des lendemains qui ne chantent plus. Ils la partagent avec celles et ceux qui fréquentent le temps long. Eux aussi sont pris de vertige. Car les études qui structurent le dialogue montrent bien les limites du modèle du développement adopté par le territoire depuis quelques décennies. Il est confronté à deux impasses : la consommation de sols induite par l’étalement de la ville, et le panache d’émissions de CO2 des mobilités automobiles. Les documents d’urbanisme concentrent aujourd’hui les capacités d’accueil dans les territoires français les plus ruraux où l’offre de logement est distante des services comme des transports en commun. C’est donc à une accélération de l’étalement urbain et une intensification de l’usage de la voiture que l’on risque d’assister, s’il n’y a pas de changement de cap. Le succès du Léman Express - le RER transfrontalier ouvert il y a trois ans - a ouvert de nouvelles perspectives, mais le territoire est toujours dépendant de la voiture individuelle qui génère l’essentiel des émissions de la mobilité terrestre. Seule une réduction drastique du parc et des kilomètres parcourus peut permettre de décarboner les mobilités du quotidien, la voiture zéro émission n’étant pas près de voir le jour. Difficile d’imaginer dans ces conditions l’accueil de 300 à 400 000 habitants d’ici le milieu du siècle sans accélérer l’étalement urbain générateur de mobilité carbonée . Ce qui est initialement une donnée d’entrée que la réflexion prospective doit intégrer, pourrait donc devenir une variable à interroger. Pour le Grand Genève, cela nécessite de dénouer des questions complexes. La croissance démographique est-elle écrite, possible, souhaitée ou souhaitable ? Comment arrêter à court terme les développements urbains et les investissements dans des infrastructures qui accentuent les vulnérabilités du territoire à la dépendance automobile ? Comment inverser radicalement la tendance et concentrer le développement urbain le long du rail ? Le Grand Genève est un territoire soumis à une pression plus intense que d’autres, mais les questions qu’il se pose aujourd’hui vont donner le vertige à beaucoup d’autres. Nous échangeons avec Mathieu Petite, adjoint de l'urbaniste cantonale du Canton de Genève. Pour en savoir plus : https://www.grand-geneve.org/ Pour retrouver tous nos podcasts et nos articles, rdv sur dixit.net ! Un podcast qui bénéficie du soutien de l'ADEME.
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Sep 19, 2023 • 56min

#85 Guillaume Meunier · Chasseur de carbone

Le secteur de la construction neuve a plutôt bien avancé dans la voie de la réduction de son empreinte carbone, mais cela ne suffira pas. Compter sur les indéniables progrès de la filière pour produire des bâtiments sobres, c’est se tromper d’objectif. Car le rythme de construction est lent et le stock immense : au moins 80 % de la ville de 2050 est déjà là. L’enjeu principal réside donc dans le parc existant. L’équation ne tiendra que si la rénovation du bâti monte enfin en puissance et qu’elle se focalise sur des rénovations globales permettant à la fois de décarboner et d’adapter les bâtiments au climat qui change. Il va falloir mobiliser des centaines de milliers de femmes et d’hommes pour engager ce chantier, en parallèle de la réduction du volume de production neuve. Car entre la baisse des besoins liés à la transition démographique et la nécessité de limiter les émissions et d’épargner les ressources, la décrue doit logiquement s’amorcer. « Si toutes les personnes en lien avec le monde du bâtiment lisaient la Stratégie Nationale Bas Carbone, elles verraient noir sur blanc que 2050, c’est 40 % de construction en moins. Je ne sais pas si toutes ont bien en tête qu’il faut construire moins et que c’est l’État qui l’écrit. » – Guillaume Meunier Adapter notre patrimoine au climat qui change, éviter de construire en l’utilisant mieux, éviter de déconstruire en transformant ce qui peut l’être, faire durer ce qui est là, et construire moins pour plus longtemps en misant sur la réversibilité. Voilà les pistes à suivre. C’est donc au moment où se décide le lancement d’un projet et se précise son programme que les décisions cruciales se prennent. C’est un instant fugace à l’échelle de la vie future du bâtiment, mais où les décisions prises sont celles qui ont le plus d’impacts sur les budgets, la consommation de sols, la mobilisation de ressources ou les émissions de CO2. Nous répondons au mieux aux besoins alors qu’il nous faut les réduire. Nous construisons alors qu’il nous faut faire durer. Nous comptons encore en euros alors que nos unités devraient être la tonne de ressource, de CO2 et de déchets. Nous ne manquons pourtant pas d’outils réglementaires pour provoquer le changement de pratique, alors pourquoi attendre ? Peut-être parce que chacun ne regarde le bâtiment que sur la courte durée de son intervention. Nous devons aligner notre regard sur son cycle de vie, pour sortir de la « tragédie de l’horizon ». Le premier des changements sera donc culturel. « Construire » est aujourd’hui synonyme de construction d’un bâtiment neuf. Demain — mais pas après-demain — cela consistera à offrir une seconde vie à un bâtiment existant. On échange aujourd’hui sur ces sujets avec Guillaume Meunier, qui est Consultant Bas Carbone à l’Institut Français pour la Performance du Bâtiment le jour, et qui passe aussi ses courtes nuits à peupler les réseaux sociaux d’analyses précises et factuelles sur les enjeux écologiques de la fabrique de la ville. Pour aller plus loin : Le profil Linkedin de Guillaume Meunier : https://www.linkedin.com/in/meunierguillaume/ Stratégie Nationale Bas Carbone Construire avec le peuple, Hassan Fathy, 1996, Actes Sud L’histoire naturelle de l’architecture, sous la direction de Philippe Rahm Séquences Bois n°138, Construire en feuillus, 2022 Pour retrouver tous nos articles et nos podcasts, rdv sur dixit.net ! Un podcast qui bénéficie du soutien de l'ADEME.
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Sep 12, 2023 • 39min

#84 Alban Senault et Paul Citron · Occupation temporaire à Césure

L'université de Sorbonne Nouvelle quitte le site de Censier, niché au cœur du 5ème arrondissement parisien. Les bâtiments des années 1970 seront occupés à nouveau par des étudiants après des travaux de réaménagement et de désamiantage. Entre-temps, un créneau de deux ans s'ouvre pour un nouveau lieu éphémère : Césure. L'EPAURIF, propriétaire des lieux, a contracté avec Plateau Urbain pour l'aménagement temporaire et l'animation des locaux pendant cette période. Les 25 000 m2 sont dédiés pour un temps aux savoirs inattendus, avec près de 200 structures accueillies (artistes, acteurs de l'ESS, médias indépendants...), 2000 étudiants qui fréquentent encore les lieux, une immense salle polyvalente de 900 m2, une bibliothèque universitaire transformée en cantine par Yes We Camp, un amphithéâtre et plein de recoins pour imaginer de belles choses. Projet d'envergure, le montage de Césure a également été l'occasion de structurer un cadre juridique équilibré qui pourra servir à d'autres lieux, même beaucoup plus modestes. Plutôt que de naviguer dans un flou assez commun dans ce type d'opération, le bail précise les responsabilités, assure la transparence des relations sans pour autant figer les choses. Cette souplesse est essentielle tant les incertitudes sont nombreuses sur les aspects techniques comme les usages. La multiplication des opérations et la professionnalisation des acteurs ont permis progressivement de développer des savoir-faire spécifiques de l'occupation temporaire. Créer les conditions techniques d'une occupation d'un bâtiment pour quelques années, c'est hybrider les pratiques de l'architecture de la transformation et celles de l'événementiel. À cela s'ajoute une attention soutenue à la sobriété des moyens déployés, quitte à faire des compromis sur les usages, et une relation étroite entre technique et programmation, que l'on retrouve dans l'organisation des lieux culturels. Mais s'il faut traiter des questions très pragmatiques telles que les responsabilités assurantielles, la réglementation incendie, les branchements électriques ou les installations sanitaires, c'est bien pour accueillir des utilisateurs. Et à Césure, ils ne manquent pas. C'est tout un métier d'organiser ce bazar pour que chacun trouve sa place en laissant de la place aux autres, pour que le frottement soit créatif et pas douloureux, pour rendre tout cela lisible et ouvrir le lieu au quartier comme au reste du monde. C'est un tiers-lieu hybride par la multiplication des acteurs et des usages, un espace commun fugace, un espace public en fait. C'est un morceau de ville qui apparaît sur la carte pour un temps seulement, mais qui se pense et se gère comme tel. Pour retrouver tous nos articles et nos podcasts, rdv sur dixit.net ! Un podcast qui bénéficie du soutien de l'ADEME.
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Sep 3, 2023 • 51min

#83 Florent Giry · Les rues parisiennes font leur métamorphose

À Paris, il n’y a pas que les grandes places ou le réseau des pistes cyclables qui transforment les espaces publics. Les rues du quotidien changent aussi progressivement de visage et d’usage. Quartier par quartier les habitantes et les habitants sont consultés pour proposer des transformations de leurs espaces publics. Rues aux écoles, développement de pistes cyclables secondaire, plantations d’arbres, mise en valeur du patrimoine… les propositions sont triées et mises en cohérence dans un programme de microtransformations des espaces publics du quotidien. Pour mieux comprendre cette démarche, on échange aujourd’hui avec Florent Giry, qui est Adjoint au Maire de Paris Centre, en charge de la voirie, des mobilités et de la gestion des chantiers. N’hésitez pas à vous abonner à notre infolettre sur dixit.net pour ne pas manquer nos prochaines publications, et bonne écoute ! Un podcast qui bénéficie du soutien de l'ADEME.
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Aug 26, 2023 • 35min

#82 Xavier Tackoen · La nouvelle vie de la gare de Jette

La Gare de Jette, au nord de Bruxelles, n’est pas une de ces gares abandonnées qui regardent passer les trains. Ici, ils s’arrêtent encore et sont même de plus en plus fréquentés. Mais le bâtiment de la gare n’a plus beaucoup d’utilité depuis que son dernier guichet a fermé. Et le lieu commence a subi dégradations et trafics, sous les yeux attristés des habitants qui voient ce morceau de patrimoine ferroviaire partir à la dérive. Car c’est une très belle petite gare de briques rouges, qui donne sur la place centrale judicieusement libérée du stationnement. Alors, pour remettre de la vie dans la Gare de Jette, la SNCB a lancé un appel à projets pour identifier un opérateur en mesure de lui trouver une nouvelle vocation. C’est un nouveau pôle socioculturel ouvert qui est en train d’émerger sous nos yeux, « Staytion », porté par trois associations et un cabinet de conseil. L’objectif ? Que la gare ne soit plus un lieu par lequel on passe, mais une destination. Alors les activités s’y multiplient : espace d’information sur les mobilités, activités culturelles intergénérationnelles, cours de guitare, couture circulaire, spectacles, réunions de partis politiques… C’est devenu en quelque mois un pôle de la vie du quartier et ce soir l’ancien buffet de la gare accueille une formation à la mobilité partagée. La gare de Jette n’est pas simplement un bâtiment qui n’est plus vide, c’est déjà un nouvel équipement public polyvalent au cœur de la ville. Pourtant, seuls 80 mètres carrés sont aujourd’hui mobilisés sur les 300 que compte la gare. Il faudrait deux millions d’euros pour remettre d’aplomb le reste avant d’y accueillir du public. Voilà pourquoi la nouvelle vie des lieux reste précaire. Les trois années qui s’ouvrent vont permettre de tester des usages, des organisations, et peut-être de démontrer par les faits l’importance des lieux et imposer cet investissement comme une évidence. Mais on ne teste pas que des usages ici. Pour Espaces Mobilités, la société de conseil qui coordonne l’occupation temporaire, c’est aussi un moyen de passer du dire au faire, et de démontrer que de nouvelles méthodologies de projet sont désormais nécessaires. Nous prenons conscience qu’il nous faut accélérer la prise de décision, tout en facilitant la participation de chacun a l’élaboration des projets. Il faut donc accepter leur imperfection, et mettre plus d’énergie sur leur adaptation a posteriori que sur leur mise au point en amont. Mais cela nécessite de travailler au corps nos organisations, pour qu’elles acceptent l’échec comme une issue possible. Il faut aussi redonner le pouvoir aux acteurs de terrain de prendre des initiatives sans dissoudre leurs idées dans des processus de validation ubuesques. Pendant les confinements, l’urgence a permis bien des apprentissages, ne les oublions pas. Je suis Sylvain Grisot, urbaniste, et j’échange aujourd’hui avec Xavier Tackoen, Administrateur délégué d’Espaces-Mobilités, qui nous raconte la nouvelle vie de la gare de Jette. Retrouvez toutes nos publications sur dixit.net Et bonne écoute ! → www.staytion.be
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Jul 10, 2023 • 48min

#81 Nicolas Quantin · Visite du quartier de l'Abbaye à Grenoble

La cité de l’Abbaye à Grenoble, c’est une quinzaine de bâtiments qui bientôt fêteront leur centenaire, pourtant rien ne présageait qu’ils passent ce cap. Quand des pathologies structurelles sont diagnostiquées en 2011, les locataires sont progressivement relogés par le bailleur social dans la perspective d’une tabula rasa permettant de relancer un nouveau cycle immobilier optimisé pour les normes constructives du moment. Mais il en faut du temps pour reloger plus de 200 familles. Près d’une décennie pendant laquelle les volets se sont fermés un à un, mais les esprits ouverts. Progressivement le maintien de la plupart des bâtiments s’est imposé comme une évidence. C’est sans doute le témoignage d’un changement d’époque, mais aussi d’une démarche de projet qui a su instiller un doute créatif en posant des questions simples et essentielles. Pourquoi démolir ce qui fonctionne ? Que peut-on faire de mieux à la place ? Alors le problème patrimonial du bailleur est progressivement devenu un enjeu urbain, puis un projet urbain aux contours encore flous. Car garder l’existant c’est accepter l’incertitude, assumer le bricolage et se lancer dans l’aventure sans connaître la fin de l’histoire. C’est aussi prendre le temps, mais sans laisser du vide. Puisque le quartier est vivant, le projet doit respecter les dynamiques qui y vivent, et même en initier de nouvelles. L’occupation temporaire de l’îlot central des « Volets Verts » s’est donc imposé comme un moyen d’occupation des lieux et de préfiguration des usages futurs. Cinq dispositifs très différents (appropriation et préfiguration des espaces publics, présence des services publics, activités sociales et solidaires, actions socio-culturelles et hébergement inclusif) occupent donc les lieux pour trois à cinq ans, animés autour d’une gouvernance partagée associant les pilotes du projet urbain, les occupants et les riverains. Inutile de chercher à tirer de grandes généralités d’un projet aussi contextuel, tissé pas à pas. À part peut-être que structurer une démarche transitoire demande d’y consacrer du temps, beaucoup de temps, quitte sans doute à ralentir le projet urbain. Mais si tout était allé vite, il ne resterait rien de la Cité. Peut-être faut-il prendre le temps de laisser mûrir les projets au contact des usages ? Et s’il fallait ralentir ? Allons visiter la Cité de l’Abbaye en compagnie de Nicolas Quantin, chef de projet pour la ville de Grenoble, de Pascal Dobias, directeur de la Maison des Habitants Abbaye-Jouhaux et de Nicolas Tixier, de Bazar Urbain, du groupement de Maitrise d’œuvre Urbaine. Pour retrouver tous nos articles et nos podcasts, rdv sur dixit.net ! Un podcast qui bénéficie du soutien de l'ADEME.
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Jun 26, 2023 • 38min

#80 Vincent Cotté · La rue commune

Quand on est attentif aux annonces des prémices de l’adaptation de nos villes au climat qui vient, on oscille entre les chiffres aussi importants que théoriques d’arbres à planter avant le fin du mandat, ou d’ambitieuses transformations d’espaces publics emblématiques qui vont de la place de la Mairie au boulevard qui change de peau pour accueillir un tramway. Tout ça est bel et bien, mais l’adaptation de nos villes passe par la transformation de tous les espaces publics, même les plus banals. C’est a ça que s’attaque le projet Rue Commune, engagé dans le développement d’un guide qui doit permettre de transformer la rue métropolitaine ordinaire. Pourquoi celle-là ? Par ce qu’elle est aujourd’hui dédiée aux flux et au stationnement, alors que la proximité des transports en commun efficaces et le faible taux d’équipement des ménages en voiture permet d’envisager aujourd’hui un autre horizon. On en discute avec Vincent Cottet, Paysagiste-urbaniste, associé chez Richez_Associés. Pour retrouver tous nos articles et nos podcasts, rdv sur dixit.net ! Un podcast qui bénéficie du soutien de l'ADEME.
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Jun 20, 2023 • 42min

#79 Thomas Benoit · Animer les rez-de-chaussée vacants

Nous voilà à Crêt-de-Roc. La sonorité du nom pourrait nous amener sur un chemin de randonnée, mais non. Il s’agit d’un quartier précaire à Saint-Etienne, qui a subit de plein fouet la désindustrialisation. Dans une ville marquée au fer rouge par cette image, certains quartiers l’ont encore plus senti passée que d’autres, et restent bien éloignés de la capitale du design, cet imaginaire nouvellement créée. Pourtant, il ne s’y passe pas rien dans ces quartiers. L’Etat y intervient, via l’ANRU notamment, pour réhabiliter des logements et en faire des espaces décents pour celles et ceux qui y logent. Mais rien n’y fait, les grilles des magasins sont toujours baissées et les couleurs de la rue ont des teintes peu chatoyantes. Ces espaces de rez-de-chaussée, à hauteur des yeux, font toute la différence, et définissent le dynamisme ou l’agonie d’une rue. C’est long et complexe de faire revivre ces espaces si spécifiques : il faut négocier avec chaque propriétaire, trouver des porteur·ses de projet qui tiennent la route, repenser les espaces pour séparer les entrées entre les logements dans le étages et le commerce du bas… Il y a de la demande, mais ça coince, ça n’avance pas. C’est une association de quartier, Rue du Développement Durable (RDD), qui se positionne pour faire bouger les choses. Elle devient médiatrice entre les porteur·ses de projet et les propriétaires. Le discours est accessible, mais assez solide et expert pour être crédible. Le parcours de l’association est semé d’embuches, ce qui lui a permit d’apprendre de ses erreurs et de se renforcer. Comme cette tentative avortée de créer une foncière solidaire Crêt de Liens pour racheter les rez-de-chaussée vacants du quartier. La motivation était là, les habitant·es soutenaient le projet, mais les biens n’étaient pas mis en vente : peur de gérer une copropriété et peur de nouveaux usages. Les porteur·ses de projet n’étaient pas ceux qu’attendaient les propriétaires : un bar fait trop de bruit, un artisan qui débute a peu de moyen… Alors tant pis ! Si les acteur·ices du territoire ne veulent pas fonctionner via une foncière, qu’à cela ne tienne, on fait différemment et on rebondit. RDD a développé d’autres outils d’accompagnement et de médiation sur le long terme, en proposant de l’animation de quartier plus ponctuelle, mais tout au long de l’année, et du portage locatif. Si tous les rideaux métalliques ne sont pas tous remontés, la rue bouge et un vent de renouveau se déploie. Parfois, dans des espaces laissés à l’abandon, quelques habitant·es se retroussent les manches et font naître de belles solidarités. Sans fanfare, sans révolution, juste avec de petits moyens, mais qui rendent la rue d’en bas un peu plus passante et joyeuse. Retrouvez tous nos podcasts et nos publications sur dixit.net. Pour aller plus loin : - Le site de Rue du Développement Durable - La ville inoccupée. Enjeux et défis des espaces urbains vacants, de Nadia Arab et Yoann Miot (Presse de l'Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, 2020) - L'urbanisme transitoire à la sauce lilloise, dixit.net, avril 2021 - Pas de vacance pour la vacance, dixit.net, mai 2022 Ce podcast bénéficie du soutien de l'ADEME.
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May 23, 2023 • 46min

#78 Sophie Poirier · Le signal : amour et recul du trait de côte

La mer avance, doucement, sur nos littoraux, où nous avons construit si près, pour être toujours plus proche d’elle. Tout en détruisant lentement les écosystèmes qui la maintenait au large. Le recul du trait de côte, bien que la formule soit imagée, fait peur à tout le monde. On y perçoit cette belle maison bourgeoise, cette maison de vacance pleine de sable ou même cette petite cabane de pêche, s’effondrer d’un bloc ou sombrer sous les vagues. C’est aussi un sujet très technique, car de quoi parle-t-on exactement ? De la mer qui monte ? Du sable, des cailloux, du sol qui s’effritent, qui s’étiolent ? Du corail qui ne fait plus rempart ? Des digues qui faiblissent ? Un peu de tout ça ? Sophie Poirier vient frôler ces enjeux, ces questionnements, mais en prenant un pas de côté important, sous l’angle de l’amour et du deuil. C’est l’histoire d’une rencontre, en 2014, à Soulac-sur-Mer. C’est l’histoire d’une passion, d’une obsession même, non pas avec un humain, mais avec un bâtiment. Avec un bloc de béton en lente dégradation. Cet immeuble, qui a été le rêve de nombreuses familles dans les années 70, s’appelle le Signal. Il a fallut faire le deuil de sa première vie, quand ses occupants ont dû plier bagage à la hâte sur arrêté préfectoral, car il menaçait de s’écrouler. Il faut dire que chaque année, les vagues se rapprochaient toujours un peu plus. Mais il a aussi fallut faire le deuil de sa seconde vie, où abandonné face aux vagues, le bâtiment a accueillit, illégalement, celles et ceux qui cherchaient un refuge, un endroit de fête, ou la découverte de l’interdit. Cet immeuble est tristement devenu célèbre, créant un précédent dans les expulsions face au risque du recul du trait de côte, souvent cité comme l’exemple à ne pas suivre. Sophie Poirier a raconté un autre versant de son histoire, lui redonnant couleurs et odeurs, ce qu’on oublie bien souvent, nous autres professionnel·les de la fabrique des territoires. Ce regard poétique et compulsif prend bien plus aux tripes que n’importe quel rapport technique alarmiste, posant encore une fois la force des récits pour nous transformer. Et même si le Signal a bel et bien été détruit, le récit de cette rencontre n’en reste pas moins d’actualité face à toutes les ruines que nous avons construites et dont il nous faut nous occuper, avec soin. Mais là, à l’abri dans cette voiture qui tangue sous les assauts du vent, avec devant les yeux Le Signal et la mer déchaînée, je comprends, c’est nous qui sommes dans la tourmente. C’est nous qu’il faut plaindre. Pour commander l'ouvrage : https://www.leslibraires.fr/livre/20069700-le-signal-recit-d-un-amour-et-d-un-immeuble-sophie-poirier-inculte-derniere-marge Pour retrouver toutes nos publications et nos podcasts : dixit.net Ce podcast bénéficie de financement de l'ADEME.

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