Bookmakers : le making-of de la littérature

ARTE Radio
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Sep 17, 2020 • 35min

Tristan Garcia : Jungles en mémoire (1/4)

Jungles en mémoire Bookmakers #4 - L’écrivain du mois : Tristan GarciaÀ l’aube de ses 40 ans, Tristan Garcia est déjà l’auteur de quinze ouvrages, dont la puissance d’imagination, la rigueur conceptuelle et la variété laissent pantois. Originaire de Toulouse, ce romancier et professeur de philosophie installé à Lyon se fait connaître à 27 ans avec « La meilleure part des hommes », un « conte moral » sur les ravages du sida dans le Paris des années 90, distingué du prix de Flore et traduit en quatre langues. Dans ses romans, ce fan de science-fiction et de littérature de genre écrit sur nos futurs, l’ultragauche, les sports oubliés ou un singe surdoué, sans oublier ses essais théoriques sur le droit des animaux, l'intensité, le sens du collectif ou la série « Six Feet Under ». En 2015, son recueil magistral de sept histoires fantastiques, paru sous le titre « 7 », reçoit le prix du Livre Inter et s’écoule à 60 000 exemplaires.En partenariat avec Babelio (1/4) Jungles en mémoire C’est un homme à la voix juvénile et d’une extrême pudeur, qui surgit en 2008 avec un premier roman très cru aiguisé pour être « une machine de guerre contre l’autofiction ». Quand Tristan Garcia publie à 27 ans « La meilleure part des hommes », un « conte moral » sur les débats, les ébats et les ravages du sida dans le Paris des années 90, ce normalien timide originaire de Toulouse, qui rêve de continents perdus, de dimensions parallèles, de transmigration des âmes et d’amour éternel, part à l’attaque de la littérature de l’intime. Il se « contrefiche de lui-même » et n’a pas « le moindre désir » de reconstituer la « petite prison de ses perceptions », ou de se créer un double de papier qui « boucherait son horizon ».Douze ans plus tard, le paysage est vaste. À l’aube de ses 40 ans, Tristan Garcia est déjà l’auteur de quinze ouvrages, dont la puissance d’imagination, la rigueur conceptuelle et la variété laissent pantois.Dans le désordre : un essai sur la série « Six Feet Under » (« Nos vies sans destin ») ; un recueil magistral de sept histoires fantastiques toutes liées entre elles, paru sous le titre « 7 », un roman sur un activiste d’ultragauche surdoué qui se prend pour le diable (« Faber, le destructeur »), un recueil de nouvelles sur des sports oubliés (« En l’absence de classement final »), une fiction de S.-F. sur un astronaute capable d’arrêter le temps (« Les Cordelettes de Browser »), un roman d’aventures scientifiques en partie rédigé par un singe qui essaie d’écrire en français (« Mémoires de la jungle »), quand il ne s’abîme pas dans « Âmes », sa gigantesque trilogie en cours sur la souffrance à tous les âges du vivant, sans oublier tous les livres théoriques de ce prof’ de philo désormais lyonnais, sur le droit des animaux, l’intensité, le sens du collectif…Mais comment tout a démarré ? Quelle est l’origin story de ce fan encyclopédique de bande dessinée ? De cet ogre de lecture à la mémoire photographique sidérante ? Lui qui créa un héros « dont l’intelligence sans sol ni plafond est une malédiction » ? Quels souvenirs demeurent de son enfance en Algérie ? Parmi tous ses nombreux romans « morts-nés » rédigés à l’adolescence, est-il vrai que l’un met en scène… le kidnapping de Beyoncé ? Enregistrements juillet 20 Entretien, découpage et lectures Richard Gaitet Prise de son Arnaud Forest Montage Sara Monimart Réalisation, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Production ARTE Radio
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Jun 25, 2020 • 36min

Delphine de Vigan : Mes heures souterraines (3/3)

Mes heures souterraines Bookmakers #3 - L’écrivaine du mois : Delphine de ViganElle a vendu plus d’un million d’exemplaires de « Rien ne s’oppose à la nuit », son « No et moi » est déjà un classique, Delphine de Vigan est la troisième invitée du podcast Bookmakers sur les écrivain.e.s au travail. Comment s’autoriser soi-même à écrire puis à rendre public des secrets familiaux ? Où se situe la frontière entre la vérité et la fiction ? Loin d’une banale causerie-promo en plateau, une émission fouillée, alerte et précise sur les livres et le métier d’écrire.En partenariat avec Babelio (3/3) Mes heures souterraines« Le succès, confie Delphine de Vigan à propos du million d’exemplaires vendus de "Rien ne s’oppose à la nuit", je l’ai vécu comme une peur. C’est vertigineux. Comme un tourbillon malgré tout joyeux. Je le souhaite à n’importe quel auteur. En même temps, il y a quelque chose de dangereux. Si j’avais connu un succès pareil plus tôt, je n’aurais probablement pas pu réécrire derrière. » En pleine élaboration de son prochain roman (policier), celle qui se décrit comme « une hypersensible en voie d’apaisement, une hyperactive en voie de ralentissement, une hyper-susceptible en quête d’auto-dérision » revient ici, dans cette troisième et dernière partie, sur sa vie d’autrice avant et après les triomphes éditoriaux, sur son style « fluide » porté par « une grande économie de moyens », sur l’imprévisible aide à l’écriture de son lave-linge et de son lave-vaisselle, voire sur une étrange affaire… de radio fantôme. Le tout, naturellement, d’après une histoire vraie. Enregistrements juin 2020 Entretien, découpage Richard Gaitet Montage Sara Monimart Lectures Ariane Brousse, Richard Gaitet Réalisation, prise de son, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Production ARTE Radio
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Jun 25, 2020 • 37min

Delphine de Vigan : Rien qu’une humble vérité (2/3)

Rien qu’une humble vérité Bookmakers #3 - L’écrivaine du mois : Delphine de ViganElle a vendu plus d’un million d’exemplaires de « Rien ne s’oppose à la nuit », son « No et moi » est déjà un classique, Delphine de Vigan est la troisième invitée du podcast Bookmakers sur les écrivain.e.s au travail. Comment s’autoriser soi-même à écrire puis à rendre public des secrets familiaux ? Où se situe la frontière entre la vérité et la fiction ? Loin d’une banale causerie-promo en plateau, une émission fouillée, alerte et précise sur les livres et le métier d’écrire.En partenariat avec Babelio (2/3) Rien qu’une humble vérité « Si j’ai écrit ce livre, c’est aussi parce que durant toute mon enfance, j’ai entendu des gens dirent : il faudra écrire sur cette famille. » En 2010, Delphine de Vigan s’engage toute entière dans l’écriture – qui ne dura que neuf mois – d’un roman prenant pour cadre et personnages sa tribu « joyeuse et dévastée ». Le temps d’offrir, plus précisément, un « cercueil de papier » à sa mère bipolaire, qu’elle rebaptise Lucile. « Rien ne s’oppose à la nuit » s’ouvre sur la découverte du corps de celle-ci, quelques jours après son suicide, par Delphine elle-même. La romancière interroge longuement ses oncles et ses tantes, enclenche le processus mais très vite, « l’élan » se brise. Quelle énergie faut-il pour faire naître un roman de deuil ? Comment s’autoriser soi-même à écrire puis à rendre public des secrets familiaux ? Comment « rapiécer les trous » de la mémoire ? Où se situe la frontière entre la vérité et la fiction ? Est-ce un soulagement d’écrire tout ça, vraiment ? Les réponses se trouvent dans cette deuxième partie de Bookmakers, pour laquelle Delphine de Vigan a, pour la première fois, relu à voix haute certains passages parmi les plus durs de son livre. Enregistrements juin 2020 Entretien, découpage Richard Gaitet Montage Sara Monimart Lectures Ariane Brousse, Richard Gaitet Réalisation, prise de son, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Production ARTE Radio
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Jun 25, 2020 • 27min

Delphine de Vigan : Osez, osez Delphine : la naissance de l'écriture (1/3)

Osez, osez Delphine : la naissance de l'écriture Bookmakers #3 - L’écrivaine du mois : Delphine de ViganElle a vendu plus d’un million d’exemplaires de « Rien ne s’oppose à la nuit », son « No et moi » est déjà un classique, Delphine de Vigan est la troisième invitée du podcast Bookmakers sur les écrivain.e.s au travail. Comment s’autoriser soi-même à écrire puis à rendre public des secrets familiaux ? Où se situe la frontière entre la vérité et la fiction ? Loin d’une banale causerie-promo en plateau, une émission fouillée, alerte et précise sur les livres et le métier d’écrire.En partenariat avec Babelio (1/3) Osez, osez Delphine ​Ses romans sont longtemps nés la nuit, quand les enfants sont couchés, quand plus rien ne s’y oppose : « Les jolis garçons » puis « Un soir de décembre », sortis en 2005, narrent tous deux les désordres amoureux de cadres urbains bon chic bon genre. Le succès surgit par surprise deux ans plus tard via « No et moi », belle histoire d’amitié entre une ado surdouée et une clocharde de dix-huit ans, qui reçoit le prix des libraires avant de connaître une trentaine de traductions et une adaptation à l’écran par Zabou Breitman, l’emportant à long terme sur les cimes du million d’exemplaires vendus puisque nos enfants l’étudient désormais à l’école. Son sens de l’observation sociale s’épaissit dans « Les Heures souterraines » (2009), roman tendu du burn out, du harcèlement moral et des solitudes qui se croisent sans jamais se rencontrer, lui valant sa première nomination pour le Goncourt.Mais d’où vient cette grande blonde à bottines, littérairement parlant ? Quelle fut la place de ce journal intime tenu pendant dix-sept ans et qui sommeille encore dans une cave ? Est-il vrai que cette conversation contient un bref extrait de son premier-premier roman, humoristique et jamais publié ? Ce sont quelques-uns des attraits de cette conversation avec Delphine de Vigan, héritière d’Annie Ernaux et de James Salter, entre introspection ciselée et drames existentiels, qui ouvrit un jour l’un de ses livres avec ce fragment de Roland Barthes : « Savoir que l’écriture ne compense rien, ne sublime rien, qu'elle est précisément là où tu n'es pas – c'est le commencement de l'écriture. »« Rien ne s’oppose à la nuit » (éditions JC Lattès, 2011)C’est avec ce roman-portrait sur « l’origine de la souffrance » de sa mère bipolaire, écrit dans « l’état de choc » imposé par le suicide de celle-ci, que Delphine de Vigan s’impose en librairies ; en lice pour le Goncourt, l’ouvrage remporte le prix du roman Fnac, celui des lectrices du magazine Elle et lui ouvre la voie d’une littérature à la fois populaire et exigeante, touchant au cœur à nouveau un million de personnes par sa vulnérabilité à ciel ouvert et l’extrême délicatesse de cette enquête familiale qui intègre les « errances narratives » de l’autrice, au plus près des émotions, avec pudeur et précision. Le triomphe du livre suivant, vraie-fausse autofiction « pour se jouer du lecteur » parue sous le titre ironique « D’après une histoire vraie » (750 000 exemplaires vendus, prix Renaudot et Goncourt des lycéens 2015, adapté au cinéma par Roman Polanski) à propos d’une romancière à succès vampirisée par une admiratrice, consolide pour de bon l’aura de ses récits tourmentés.  Enregistrements juin 20 Entretien, découpage Richard Gaitet Montage Sara Monimart Lectures Ariane Brousse, Richard Gaitet Réalisation, prise de son, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Production ARTE Radio
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Apr 15, 2020 • 22min

Alice Zeniter : La stratégie de la semoule (3/3)

La stratégie de la semoule : une écrivaine au travail Dans cette dernière partie de ce contrôle technique sur l’art littéraire d’Alice Zeniter, la romancière  développe, toujours à propos de « L’Art de perdre », quels ont été les conseils de son éditrice, sa lecture commentée à voix haute du manuscrit entier à son compagnon, sa discipline quotidienne dans sa maison bretonne (repoussant très loin les limites de la semoule), l’accompagnement musical d’Idir ou de Dr. Dre, sa passion naturelle pour l’humour animalier, sa vision « fantasmée » du texte deux ans plus tard, son rapport à l’argent, ou encore sa décision de ne pas avoir d’enfant, liée, elle aussi, à l’écriture.En partenariat avec Babelio L’écrivaine du mois : Alice ZeniterRomancière, dramaturge, metteuse en scène, traductrice et scénariste, Alice Zeniter, 33 ans, est l’un des voix les plus énergiques de la littérature francophone. Née d’un père algérien et d’un mère française, diplômée de l’École Normale Supérieure, elle publie un premier roman confidentiel à 16 ans puis signe à 23 chez Albin Michel pour le second, « Jusque dans nos bras » (2010), dans lequel elle aborde la question du mariage blanc avec un héros malien menacé d'expulsion. Elle s’installe ensuite pendant trois ans à Budapest où elle enseigne le français, étudie le théâtre et « flâne ». Viendra « Sombre dimanche » (2013), roman d’une famille hongroise sur trois générations, puis « Juste avant l’oubli » (2015), à propos du suicide étrange d’un maître du polar sur une île brumeuse des Hébrides. Tout s’accélère deux ans plus tard avec « L’Art de perdre », prix Goncourt des lycéens, dont nous parlerons ici de A jusqu’à Z.« L’Art de perdre » (Flammarion, 2017)« Ai-je oublié d’où je viens ? », se demande Naïma, trentenaire parisienne en sévère gueule de bois. « Ma détresse n’aurait-elle pas la taille d’un pays manquant, d’une religion perdue ? » Par sa voix, L’Art de perdre suit le destin d’une famille kabyle sur trois générations – des années 40 à nos jours, sur 500 pages, en trois parties. Il y a d’abord Ali, le grand-père, harki, c’est-à-dire « supplétif indigène au service de l’armée française » comme dit le dico, contraint de fuir ses montagnes avec femme et enfants face au FLN et ses « règlements de compte au milieu de la nuit », à l’heure de l’indépendance de 1962. La deuxième partie se focalise sur Hamid, le père, qui n’oubliera jamais leur installation dans « la France froide », dans ces camps d’accueil insalubres et surpeuplés des Bouches-du-Rhône, entourés de barbelés, dans le silence de ceux qui attendent, humiliés, parqués « dans le royaume de la boue », « comme des bêtes nuisibles » ; Hamid, qui se politisera et s’en sortira grâce à ses études, et qui épousera une Française. Il y a enfin Naïma, la petite-fille, qui cherche sa place dans cet héritage.Sacré du Goncourt des lycéens et du prix du journal Le Monde, « L’Art de perdre » a beaucoup gagné : le roman se vend à plus de 580 000 exemplaires et décroche des récompenses en Espagne, en Suisse ou en Pologne, tandis que Barbet Schroeder obtient les droits d’adaptation au cinéma. Le succès critique n’a d’égal que sa reconnaissance publique, voire intime, lorsqu’au premier rang de certains festivals où Alice Zeniter est invitée, d’anciens harkis s’assoient parfois, en uniforme, la poitrine chargée de médailles, comme jadis son propre grand-père. Mais comment s’est-elle jetée dans cette fresque romanesque à haute teneur documentaire ? Parions que la réponse est dans Bookmakers. Le podcast Bookmakers devient une collection de livres !Nicolas Mathieu, Alice Zeniter et Maria Pourchet nous dévoilent les coulisses de la fabrication de leurs œuvres.Comment travaillent-ils leur plume ? Ils nous détaillent leurs secrets d'écriture, de leur discipline, à leur rythme de travail.Une coédition ARTE Éditions / Points. Enregistrements janvier-mars 2020 Entretien, découpage et lectures Richard Gaitet Prises de son Sara Monimart Montage Antoine Larcher Réalisation, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Production ARTE Radio
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Apr 15, 2020 • 26min

Alice Zeniter : Vers les vers blancs (2/3)

Vers les vers blancs : une écrivaine au travail Après l’origine de sa vocation, ses voyages en Algérie et sa documentation somme toute assez anarchique, Alice Zeniter revient en détails sur la structure de son best-seller, la naissance des personnages, l’intérêt – ou non – de puiser dans sa mythologie familiale, le juste dosage du style, voire sa maîtrise secrète du vers classique français, cachée (du bon pied) sous les phrases de son roman « L’Art de perdre ».En partenariat avec Babelio L’écrivaine du mois : Alice ZeniterRomancière, dramaturge, metteuse en scène, traductrice et scénariste, Alice Zeniter, 33 ans, est l’un des voix les plus énergiques de la littérature francophone. Née d’un père algérien et d’un mère française, diplômée de l’École Normale Supérieure, elle publie un premier roman confidentiel à 16 ans puis signe à 23 chez Albin Michel pour le second, « Jusque dans nos bras » (2010), dans lequel elle aborde la question du mariage blanc avec un héros malien menacé d'expulsion. Elle s’installe ensuite pendant trois ans à Budapest où elle enseigne le français, étudie le théâtre et « flâne ». Viendra « Sombre dimanche » (2013), roman d’une famille hongroise sur trois générations, puis « Juste avant l’oubli » (2015), à propos du suicide étrange d’un maître du polar sur une île brumeuse des Hébrides. Tout s’accélère deux ans plus tard avec « L’Art de perdre », prix Goncourt des lycéens, dont nous parlerons ici de A jusqu’à Z.« L’Art de perdre » (Flammarion, 2017)« Ai-je oublié d’où je viens ? », se demande Naïma, trentenaire parisienne en sévère gueule de bois. « Ma détresse n’aurait-elle pas la taille d’un pays manquant, d’une religion perdue ? » Par sa voix, L’Art de perdre suit le destin d’une famille kabyle sur trois générations – des années 40 à nos jours, sur 500 pages, en trois parties. Il y a d’abord Ali, le grand-père, harki, c’est-à-dire « supplétif indigène au service de l’armée française » comme dit le dico, contraint de fuir ses montagnes avec femme et enfants face au FLN et ses « règlements de compte au milieu de la nuit », à l’heure de l’indépendance de 1962. La deuxième partie se focalise sur Hamid, le père, qui n’oubliera jamais leur installation dans « la France froide », dans ces camps d’accueil insalubres et surpeuplés des Bouches-du-Rhône, entourés de barbelés, dans le silence de ceux qui attendent, humiliés, parqués « dans le royaume de la boue », « comme des bêtes nuisibles » ; Hamid, qui se politisera et s’en sortira grâce à ses études, et qui épousera une Française. Il y a enfin Naïma, la petite-fille, qui cherche sa place dans cet héritage.Sacré du Goncourt des lycéens et du prix du journal Le Monde, « L’Art de perdre » a beaucoup gagné : le roman se vend à plus de 580 000 exemplaires et décroche des récompenses en Espagne, en Suisse ou en Pologne, tandis que Barbet Schroeder obtient les droits d’adaptation au cinéma. Le succès critique n’a d’égal que sa reconnaissance publique, voire intime, lorsqu’au premier rang de certains festivals où Alice Zeniter est invitée, d’anciens harkis s’assoient parfois, en uniforme, la poitrine chargée de médailles, comme jadis son propre grand-père. Mais comment s’est-elle jetée dans cette fresque romanesque à haute teneur documentaire ? Parions que la réponse est dans Bookmakers. Le podcast Bookmakers devient une collection de livres !Nicolas Mathieu, Alice Zeniter et Maria Pourchet nous dévoilent les coulisses de la fabrication de leurs œuvres.Comment travaillent-ils leur plume ? Ils nous détaillent leurs secrets d'écriture, de leur discipline, à leur rythme de travail.Une coédition ARTE Éditions / Points. Enregistrements janvier-mars 2020 Entretien, découpage et lectures Richard Gaitet Prises de son Sara Monimart Montage Antoine Larcher Réalisation, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Production ARTE Radio
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Apr 15, 2020 • 34min

Alice Zeniter : Au pays des merveilles (1/3)

Au pays des merveilles : une écrivaine au travail Dans son panthéon : Tolkien, Zola, Faulkner ou Apollinaire, tous découverts durant l’enfance par cette lectrice et autrice précoce pour qui l’écriture a toujours été « le plus drôle de tous les jeux ». Sa rencontre à l’école primaire avec la romancière et dramaturge Géva Caban la conforte dans son désir d’explorer l’art du récit, en se posant les questions élémentaires. Peut-on chiper des idées à Stephen King ? Lui-même, n’aurait-il pas barboté quelques trucs et astuces à ses illustres prédécesseurs ? À qui envoyer sa prose, quand on a terminé ? Car c’est la règle, pour Alice : « Il faut d’abord apprendre à finir un texte. »Passée l’évocation de cette jeunesse normande, ce premier épisode s’attarde sur la « danse de l’hésitation » qui précéda la conception de son cinquième roman, « L’Art de perdre », lié à son histoire familiale, ses deux voyages nécessaires en Algérie, le choc ressenti devant le film « La Bataille d’Alger » (Gillo Pontecorvo, 1966) et ses recherches « totalement bordéliques ».En partenariat avec Babelio L’écrivaine du mois : Alice ZeniterRomancière, dramaturge, metteuse en scène, traductrice et scénariste, Alice Zeniter, 33 ans, est l’un des voix les plus énergiques de la littérature francophone. Née d’un père algérien et d’un mère française, diplômée de l’École Normale Supérieure, elle publie un premier roman confidentiel à 16 ans puis signe à 23 chez Albin Michel pour le second, « Jusque dans nos bras » (2010), dans lequel elle aborde la question du mariage blanc avec un héros malien menacé d'expulsion. Elle s’installe ensuite pendant trois ans à Budapest où elle enseigne le français, étudie le théâtre et « flâne ». Viendra « Sombre dimanche » (2013), roman d’une famille hongroise sur trois générations, puis « Juste avant l’oubli » (2015), à propos du suicide étrange d’un maître du polar sur une île brumeuse des Hébrides. Tout s’accélère deux ans plus tard avec « L’Art de perdre », prix Goncourt des lycéens, dont nous parlerons ici de A jusqu’à Z.« L’Art de perdre » (Flammarion, 2017)« Ai-je oublié d’où je viens ? », se demande Naïma, trentenaire parisienne en sévère gueule de bois. « Ma détresse n’aurait-elle pas la taille d’un pays manquant, d’une religion perdue ? » Par sa voix, L’Art de perdre suit le destin d’une famille kabyle sur trois générations – des années 40 à nos jours, sur 500 pages, en trois parties. Il y a d’abord Ali, le grand-père, harki, c’est-à-dire « supplétif indigène au service de l’armée française » comme dit le dico, contraint de fuir ses montagnes avec femme et enfants face au FLN et ses « règlements de compte au milieu de la nuit », à l’heure de l’indépendance de 1962. La deuxième partie se focalise sur Hamid, le père, qui n’oubliera jamais leur installation dans « la France froide », dans ces camps d’accueil insalubres et surpeuplés des Bouches-du-Rhône, entourés de barbelés, dans le silence de ceux qui attendent, humiliés, parqués « dans le royaume de la boue », « comme des bêtes nuisibles » ; Hamid, qui se politisera et s’en sortira grâce à ses études, et qui épousera une Française. Il y a enfin Naïma, la petite-fille, qui cherche sa place dans cet héritage.Sacré du Goncourt des lycéens et du prix du journal Le Monde, « L’Art de perdre » a beaucoup gagné : le roman se vend à plus de 580 000 exemplaires et décroche des récompenses en Espagne, en Suisse ou en Pologne, tandis que Barbet Schroeder obtient les droits d’adaptation au cinéma. Le succès critique n’a d’égal que sa reconnaissance publique, voire intime, lorsqu’au premier rang de certains festivals où Alice Zeniter est invitée, d’anciens harkis s’assoient parfois, en uniforme, la poitrine chargée de médailles, comme jadis son propre grand-père. Mais comment s’est-elle jetée dans cette fresque romanesque à haute teneur documentaire ? Parions que la réponse est dans Bookmakers. Le podcast Bookmakers devient une collection de livres !Nicolas Mathieu, Alice Zeniter et Maria Pourchet nous dévoilent les coulisses de la fabrication de leurs œuvres.Comment travaillent-ils leur plume ? Ils nous détaillent leurs secrets d'écriture, de leur discipline, à leur rythme de travail.Une coédition ARTE Éditions / Points. Enregistrements janvier-mars 2020 Entretien, découpage et lectures Richard Gaitet Prises de son Sara Monimart Montage Antoine Larcher Réalisation, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Production ARTE Radio
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Mar 18, 2020 • 26min

Philippe Jaenada : Mais comment ça bosse, un chameau sauvage ? (3/3)

Mais comment ça bosse, un chameau sauvage ? Un écrivain au travail (3/3) Enfermé chez lui depuis des mois pour écrire son nouveau livre-enquête de possiblement mille pages, à paraître en 2021, à propos d'un étrangleur d'enfant, l’ours Jaenada sort de sa grotte et commente, dans cette troisième et dernière partie, son travail sur la phrase, son noble combat contre les expressions toutes faites (type : « c’est la goutte qui fait déborder le vase ») ou la place de l'argent dans sa vie d'écrivain.Le podcast BookmakersC’est quoi, le style ? Comment construit-on une intrigue, un personnage ? Où faut-il couper ?Chaque mois, Bookmakers propose aux plus grand.e.s écrivain.e.s d’aujourd’hui de raconter, hors de toute promotion, l’étincelle initiale, les recherches, la discipline, les obstacles, le découragement, les coups de collier, la solitude, la première phrase, les relectures… mais aussi le rôle de l'éditeur, de l’argent, la réception critique et publique, le regard sur le texte des années plus tard.Animé par Richard Gaitet, écrivain et homme de radio, le podcast Bookmakers détruit le mythe d’une inspiration divine qui saisirait les auteurs au petit matin. Il rappelle que l'écriture est aussi un métier, un artisanat, un beau travail.En partenariat avec BabelioL'écrivain du mois : Philippe JaenadaFils spirituel de Bukowski et de Jacques le fataliste, féru de courses hippiques ou de whisky écossais, allergique au voyage mais ne se déplaçant jamais sans son sac matelot, Philippe Jaenada, 55 ans, est peut-être l’écrivain le plus drôle de France. Toujours vêtu de noir, il surgit en 1997 avec Le Chameau sauvage, ou les galères d’un curieux célibataire, sacré d’un prix de Flore, adapté au cinéma et premier volet d’une série de sept romans autobiographiques sur lui, sa femme, leur fiston ou leurs vacances incendiaires en Italie.Suivra un second cycle, en cours depuis 2013, composé d’enquêtes sur des affaires criminelles écrites à la première personne, riches en digressions improbables, tout en étant comme possédées par l’obsession de la vérité – fidèle à sa méthode dite du « tapir enragé ». Bingo : La Serpe, en 2017, se voit couronné du prix Femina et se vend à plus de 400 000 exemplaires. Mais ce succès fut préparé par la maestria déployée dans le livre précédent, La Petite femelle (éditions Julliard, 2015), portrait d’une jeune meurtrière de l’immédiate après-guerre haïe par ses juges et plus généralement par le patriarcat parce qu’elle refusait de marcher dans les clous d’une existence toute tracée de femme au foyer.Fidèle à sa verve truculente, Philippe Jaenada détaille les conditions de fabrication de cette true crime story de 700 pages, mais également des circonstances étranges qui l’ont amené à devenir écrivain.La Petite Femelle (Julliard, 2015)C’est l’histoire de Pauline Dubuisson, condamnée en 1953 pour le meurtre de son ex-petit ami, mais traînée dans la boue par les journaux pour avoir couché, jeune femme, avec l’occupant allemand, tout en refusant après-guerre un destin de femme au foyer pour devenir médecin. Enregistrement janvier 20 Entretiens et découpage Richard Gaitet Prises de son Sara Monimart Montage Antoine Larcher Réalisation, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Lectures Laure Giappiconi Remerciements Nanou Harry & Aurélien Manya Lecture Laure Giappiconi Production ARTE Radio
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Mar 18, 2020 • 30min

Philippe Jaenada : La méthode du tapir enragé (2/3)

La méthode du tapir enragé : un écrivain au travail (2/3) Dans cette deuxième partie, Jaenada décortique l’origine et la documentation nécessaire à l’élaboration de La Petite femelle. Après sept livres autobiographiques ayant fait de lui une sorte de Bukowski français (alcool, amour, humour, tiercé) et une première enquête sur le braqueur Bruno Sulak, c’est l’ouvrage qui a tout changé pour lui, extrêmement précis (selon sa méthode dite du « tapir enragé », vérifiant toutes les pièces du dossier jusqu’aux frontières de la folie), tout en cassant les codes de la chronique judiciaire par une avalanche d’anecdotes personnelles particulièrement comiques. Le podcast BookmakersC’est quoi, le style ? Comment construit-on une intrigue, un personnage ? Où faut-il couper ?Chaque mois, Bookmakers propose aux plus grand.e.s écrivain.e.s d’aujourd’hui de raconter, hors de toute promotion, l’étincelle initiale, les recherches, la discipline, les obstacles, le découragement, les coups de collier, la solitude, la première phrase, les relectures… mais aussi le rôle de l'éditeur, de l’argent, la réception critique et publique, le regard sur le texte des années plus tard.Animé par Richard Gaitet, écrivain et homme de radio, le podcast Bookmakers détruit le mythe d’une inspiration divine qui saisirait les auteurs au petit matin. Il rappelle que l'écriture est aussi un métier, un artisanat, un beau travail.En partenariat avec BabelioL'écrivain du mois : Philippe Jaenada Fils spirituel de Bukowski et de Jacques le fataliste, féru de courses hippiques ou de whisky écossais, allergique au voyage mais ne se déplaçant jamais sans son sac matelot, Philippe Jaenada, 55 ans, est peut-être l’écrivain le plus drôle de France. Toujours vêtu de noir, il surgit en 1997 avec Le Chameau sauvage, ou les galères d’un curieux célibataire, sacré d’un prix de Flore, adapté au cinéma et premier volet d’une série de sept romans autobiographiques sur lui, sa femme, leur fiston ou leurs vacances incendiaires en Italie.Suivra un second cycle, en cours depuis 2013, composé d’enquêtes sur des affaires criminelles écrites à la première personne, riches en digressions improbables, tout en étant comme possédées par l’obsession de la vérité – fidèle à sa méthode dite du « tapir enragé ». Bingo : La Serpe, en 2017, se voit couronné du prix Femina et se vend à plus de 400 000 exemplaires. Mais ce succès fut préparé par la maestria déployée dans le livre précédent, La Petite femelle (éditions Julliard, 2015), portrait d’une jeune meurtrière de l’immédiate après-guerre haïe par ses juges et plus généralement par le patriarcat parce qu’elle refusait de marcher dans les clous d’une existence toute tracée de femme au foyer.Fidèle à sa verve truculente, Philippe Jaenada détaille les conditions de fabrication de cette true crime story de 700 pages, mais également des circonstances étranges qui l’ont amené à devenir écrivain.La Petite Femelle (Julliard, 2015)C’est l’histoire de Pauline Dubuisson, condamnée en 1953 pour le meurtre de son ex-petit ami, mais traînée dans la boue par les journaux pour avoir couché, jeune femme, avec l’occupant allemand, tout en refusant après-guerre un destin de femme au foyer pour devenir médecin. Enregistrement janvier 20 Entretiens et découpage Richard Gaitet Prises de son Sara Monimart Montage Antoine Larcher Réalisation, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Lectures Laure Giappiconi Remerciements Nanou Harry & Aurélien Manya Lecture Laure Giappiconi Production ARTE Radio
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Mar 18, 2020 • 31min

Philippe Jaenada : Philippe et ses trophées de bowling (1/3)

Philippe et ses trophées de bowling : un écrivain au travail Il se rêvait pilote d’avion, mais l’existence en a décidé autrement, à la faveur d’une très étrange idée : s’enfermer seul, pendant un an, dans son appartement. « Pour ne pas devenir fou », le jeune Jaenada commence à écrire des histoires saugrenues influencées par sa découverte des romans de l’Américain Richard Brautigan, notamment Willard et ses trophées de bowling (1975). S’en suivra une expérience historique (« J’ai été la première animatrice de minitel rose du monde ! »), un premier roman « ridicule », dit-il, écrit sur demande du patron légendaire des éditions de Minuit… et son interprétation très personnelle, à renforts de parenthèses, de la célèbre phrase de Deleuze : « Un grand écrivain, c’est un étranger dans sa propre langue. »Le podcast BookmakersC’est quoi, le style ? Comment construit-on une intrigue, un personnage ? Où faut-il couper ?Chaque mois, Bookmakers propose aux plus grand.e.s écrivain.e.s d’aujourd’hui de raconter, hors de toute promotion, l’étincelle initiale, les recherches, la discipline, les obstacles, le découragement, les coups de collier, la solitude, la première phrase, les relectures… mais aussi le rôle de l'éditeur, de l’argent, la réception critique et publique, le regard sur le texte des années plus tard. Animé par Richard Gaitet, écrivain et homme de radio, le podcast Bookmakers détruit le mythe d’une inspiration divine qui saisirait les auteurs au petit matin. Il rappelle que l'écriture est aussi un métier, un artisanat, un beau travail.En partenariat avec Babelio L'écrivain du mois : Philippe JaenadaFils spirituel de Bukowski et de Jacques le fataliste, féru de courses hippiques ou de whisky écossais, allergique au voyage mais ne se déplaçant jamais sans son sac matelot, Philippe Jaenada, 55 ans, est peut-être l’écrivain le plus drôle de France. Toujours vêtu de noir, il surgit en 1997 avec Le Chameau sauvage, ou les galères d’un curieux célibataire, sacré d’un prix de Flore, adapté au cinéma et premier volet d’une série de sept romans autobiographiques sur lui, sa femme, leur fiston ou leurs vacances incendiaires en Italie.Suivra un second cycle, en cours depuis 2013, composé d’enquêtes sur des affaires criminelles écrites à la première personne, riches en digressions improbables, tout en étant comme possédées par l’obsession de la vérité – fidèle à sa méthode dite du « tapir enragé ». Bingo : La Serpe, en 2017, se voit couronné du prix Femina et se vend à plus de 400 000 exemplaires. Mais ce succès fut préparé par la maestria déployée dans le livre précédent, La Petite femelle (éditions Julliard, 2015), portrait d’une jeune meurtrière de l’immédiate après-guerre haïe par ses juges et plus généralement par le patriarcat parce qu’elle refusait de marcher dans les clous d’une existence toute tracée de femme au foyer.Fidèle à sa verve truculente, Philippe Jaenada détaille les conditions de fabrication de cette true crime story de 700 pages, mais également des circonstances étranges qui l’ont amené à devenir écrivain.La Petite Femelle (Julliard, 2015)C’est l’histoire de Pauline Dubuisson, condamnée en 1953 pour le meurtre de son ex-petit ami, mais traînée dans la boue par les journaux pour avoir couché, jeune femme, avec l’occupant allemand, tout en refusant après-guerre un destin de femme au foyer pour devenir médecin. Après sept livres autobiographiques ayant fait de lui une sorte de Bukowski français (alcool, amour, humour, tiercé), c’est le livre qui a tout changé pour Philippe Jaenada. Extrêmement précis (selon sa méthode dite du « tapir enragé », vérifiant toutes les pièces du dossier jusqu’aux frontières de la folie), tout en cassant les codes de la chronique judiciaire par une avalanche d’apartés personnels particulièrement comiques. Enregistrement janvier 20 Entretiens et découpage Richard Gaitet Prises de son Sara Monimart Montage Antoine Larcher Réalisation, musique originale et mixage Samuel Hirsch Illustrations Sylvain Cabot Remerciements Nanou Harry & Aurélien Manya Lecture Laure Giappiconi Production ARTE Radio

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