Religion, histoire et société dans le monde grec antique - Vinciane Pirenne-Delforge

Collège de France
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Feb 13, 2020 • 54min

04 - Dieux, daimones, héros (II)

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2019-2020Un dossier de dédicaces provenant de Thespies en Béotie permet d'enrichir les perspectives ouvertes par les documents athéniens. Agathos daimōn y fait l'objet de démarches dédicatoires depuis la fin de la période classique au moins et ces démarches s'inscrivaient dans le cadre d'un sanctuaire où les reliefs étaient dédiés. Le dieu y assume une apparence anthropomorphe, dont les attributs sont puisés au registre des éléments associés à la figure de Zeus. Toujours en Béotie, à Lébadée, des piliers sont offerts au daimōn Meilichios, à Meilichios et à Zeus Meilichios, ce qui atteste une équivalence structurelle entre daimōn et Zeus pareillement qualifiés sur un ensemble cohérent d'objets. Cette association ouvre une série de réflexions sur la portée du culte de Zeus Meilichios, notamment à Athènes, au Pirée, là d'où provient le relief étudié au cours précédent et qui est alors replacé dans son contexte topographique et fonctionnel.
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Feb 6, 2020 • 59min

03 - Dieux, daimones, héros (II)

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2019-2020Un dossier de dédicaces provenant de Thespies en Béotie permet d'enrichir les perspectives ouvertes par les documents athéniens. Agathos daimōn y fait l'objet de démarches dédicatoires depuis la fin de la période classique au moins et ces démarches s'inscrivaient dans le cadre d'un sanctuaire où les reliefs étaient dédiés. Le dieu y assume une apparence anthropomorphe, dont les attributs sont puisés au registre des éléments associés à la figure de Zeus. Toujours en Béotie, à Lébadée, des piliers sont offerts au daimōn Meilichios, à Meilichios et à Zeus Meilichios, ce qui atteste une équivalence structurelle entre daimōn et Zeus pareillement qualifiés sur un ensemble cohérent d'objets. Cette association ouvre une série de réflexions sur la portée du culte de Zeus Meilichios, notamment à Athènes, au Pirée, là d'où provient le relief étudié au cours précédent et qui est alors replacé dans son contexte topographique et fonctionnel.
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Jan 30, 2020 • 1h 1min

02 - Dieux, daimones, héros (II)

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2019-2020Dieux, daimones, héros (II)La pluralité du monde suprahumain des Grecs se définit par une multiplicité de figures divines et héroïques. Mais qu'est-ce qui fait le dieu ou le héros ? Comment circonscrire ces catégories générales attestées dans la documentation antique et dont les chercheurs modernes usent largement ? Comment comprendre, en outre, le terme de daimōn qui apparaît dans la poésie en lien avec l'action divine ? Poursuivant l'investigation ouverte l'an dernier, nous tenterons de comprendre la dimension cultuelle du daimōn quand il est qualifié de « bon daimōn » (Agathos daimōn) en relation avec Dionysos, la Bonne Fortune (Agathē Tychē) et un Zeus local, voire familial, pourvoyeur de bienfaits. Sur un tel plan cultuel seront également convoquées les Nymphes, dont le nom commun renvoie à la jeune fille en âge de se marier. Le statut intermédiaire de ces dernières, dont plusieurs textes font des entités mortelles, permet d'enrichir et d'affiner l'interrogation sur le statut divin. Enfin, le statut de « héros » ajoute à ce paysage suprahumain une autre déclinaison de l'ambiguïté des destinataires cultuels, sur le large spectre qui va de la mortalité des hommes, limités dans leur action, à l'immortalité des dieux, caractérisés par leur puissance.
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Jan 23, 2020 • 57min

01 - Dieux, daimones, héros (II)

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2019-2020Dieux, daimones, héros (II)La pluralité du monde suprahumain des Grecs se définit par une multiplicité de figures divines et héroïques. Mais qu'est-ce qui fait le dieu ou le héros ? Comment circonscrire ces catégories générales attestées dans la documentation antique et dont les chercheurs modernes usent largement ? Comment comprendre, en outre, le terme de daimōn qui apparaît dans la poésie en lien avec l'action divine ? Poursuivant l'investigation ouverte l'an dernier, nous tenterons de comprendre la dimension cultuelle du daimōn quand il est qualifié de « bon daimōn » (Agathos daimōn) en relation avec Dionysos, la Bonne Fortune (Agathē Tychē) et un Zeus local, voire familial, pourvoyeur de bienfaits. Sur un tel plan cultuel seront également convoquées les Nymphes, dont le nom commun renvoie à la jeune fille en âge de se marier. Le statut intermédiaire de ces dernières, dont plusieurs textes font des entités mortelles, permet d'enrichir et d'affiner l'interrogation sur le statut divin. Enfin, le statut de « héros » ajoute à ce paysage suprahumain une autre déclinaison de l'ambiguïté des destinataires cultuels, sur le large spectre qui va de la mortalité des hommes, limités dans leur action, à l'immortalité des dieux, caractérisés par leur puissance.
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Apr 18, 2019 • 59min

11 - Dieux, daimones, héros

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2018-2019
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Apr 11, 2019 • 57min

10 - Dieux, daimones, héros

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2018-2019Le célèbre passage du livre II (53) d'Hérodote où il affirme que les poètes ont « fabriqué pour les dieux une généalogie, leur ont donné leurs surnoms, ont réparti entre eux honneurs et compétences, et signifié leurs figures » est précédé d'une étymologie fantaisiste du mot theos. Les dieux sont ainsi appelés (theoi), selon l'historien, car, « ayant mis en ordre (thentes) toutes choses, ils président à toutes les répartitions » (II, 52). Cette vision émique des dieux les fait apparaître comme des instances dispensatrices, distributrices, régulatrices. Or, l'étymologie de daimôn qui, pour sa part, n'a rien de fantaisiste en fait un agent dispensateur, distributeur. La résonance entre la conception de l'action des dieux dans le monde telle que la dessine Hérodote et l'étymologie de daimôn invite à creuser ce sillon sémantique selon trois axes. Le premier tient à la répartition des biens et des maux qui est inhérente à l'emprise des dieux sur la condition humaine. S'y rattache également l'idée de « sort » et de « destinée ». Le deuxième axe tient à la distribution de la puissance divine elle-même dans un système polythéiste où les dieux sont nombreux et associés à des honneurs et des compétences spécifiques : le daimôn est une notion qui permet de « cristalliser » ces compétences particulières en leur donnant un nom. Le troisième axe tient à la distribution des dieux dans l'espace. Dans l'économie générale du monde telle que l'évoquent les poèmes archaïques, tous les dieux ne sont pas situés en un même lieu, et cette localisation plus ou moins spécifique exprime une facette de leur timè respective. Dans cette perspective, les daimones deviennent des dieux « épichtoniens », situés sur terre, parmi les hommes. C'est leur caractère topique qui explique pourquoi Platon opère une classification des entités supra-humaines à honorer dans sa cité idéale en trois ensembles : dieux – daimones – héros, à savoir les divinités « olympiennes » – voire panhelléniques –, les divinités du terroir et les héros.
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Apr 4, 2019 • 1h 11min

09 - Dieux, daimones, héros

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2018-2019Diverses orientations sémantiques traversent les tragédies complètes que nous avons conservées. La première est celle de la synonymie entre theos et daimôn, telle qu'on l'a rencontrée déjà, tant au pluriel qu'au singulier. Certaines occurrences qui relèvent d'une telle alternance semblent toutefois la dépasser en ajoutant l'aspect « marqué » d'une action divine dans le monde, comme le cas de Dionysos qualifié de daimôn « manifeste » dans les Bacchantes. La deuxième orientation sémantique concerne la « cristallisation » d'une action divine qui prend une consistance propre, dans le bien comme dans le mal attribué aux humains. La troisième voie fait passer d'une action divine conjoncturelle, que l'on pourra parfois traduire par « le sort », à une situation structurelle où les actions s'enchainent dans une suite que l'on peut alors désigner sous le terme de « destinée ». La quatrième orientation est étroitement liée à la précédente et concerne ce que l'on peut appeler brièvement « le daimôn familial ». Il évoque la récurrence, de génération en génération dans une même lignée, du bonheur ou du malheur, la matière tragique faisant plutôt droit au daimôn négatif, par exemple dans la famille des Atrides ou celle des Labdacides. Enfin, en cinquième et dernière instance, on s'interroge sur l'attribution du nom daimôn à des défunts comme Darius dans les Perses d'Eschyle, Alceste dans la pièce éponyme d'Euripide, ou encore Rhésos qualifié d'anthrôpodaimôn dans la pièce éponyme du pseudo-Euripide. Dans ce dernier cas, le contexte de l'existence post-mortem de Rhésos invite à rapprocher l'hapax anthrôpodaimôn du daimôn dios que devient Phaéthon à la fin de la Théogonie.
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Mar 28, 2019 • 57min

08 - Dieux, daimones, héros

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2018-2019Un humain eudaimôn est « aimé des dieux immortels », ainsi que l'affirme Théognis. Dans ses Élégies qui font se succéder des sentences gnomiques et moralisantes où le terme daimôn a sa place, on perçoit clairement la valeur distributive des actions de daimones à qui est rapportée la répartition des biens et des maux dans la vie humaine. Cependant, quand il s'agit de prier pour obtenir un sort favorable, c'est à un dieu spécifique que l'on s'adresse, quitte à solliciter l'envoi d'un daimôn. Cette hiérarchisation crée les conditions de la cristallisation de la puissance d'une dieu sous forme d'un agent telle qu'on l'a déjà perçue dans l'Odyssée et chez Sappho. Il arrive, comme dans le cas de Phaéthon, qu'un daimôn reçoive un nom propre. C'est ce que l'on trouve chez Théognis, où eris, l'espoir, et kindunos, le danger, sont considérés comme « des daimones redoutables » (v. 637-638). Mais, par ailleurs, eris est « la seule divinité bénéfique parmi les hommes », ce qui montre une fois de plus la participation du daimôn à la divinité et la fluidité des catégories. La comparaison de ces affirmations élégiaques et gnomiques avec l'expression de la condition humaine telle que la mettent en scène la Théogonie et Les Travaux et les Jours permet de voir à l'œuvre ces glissements entre statut divin et action démonique rapportée à un dieu. Les Épinicies de Pindare élargissent encore le champ en plaçant la distinction entre dieux et mortels dans le registre de la puissance et de l'action des premiers sur le cours de la vie des seconds. Cette action, qu'elle soit positive ou négative, passe à nouveau par le biais de l'action démonique. Et quand elle est positive, l'humain est bel et bien eudaimôn.
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Mar 21, 2019 • 58min

07 - Dieux, daimones, héros

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2018-2019Les daimones des Travaux sont collectifs et mandatés par Zeus. La seule attestation du mot dans la Théogonie apparaît quant à elle au singulier. Elle concerne Phaéthon, « le lumineux », fils d'Éos, la déesse Aurore, et de Képhalos, un humain mortel. Enlevé par Aphrodite dans la fleur de sa jeunesse, la déesse en fait un daimôn divin, « desservant de l'intérieur dans ses temples divins » (986-991). D'autres cas d'enlèvements d'humains par une déesse sont énumérés par la même Aphrodite dans l'Hymne pseudo-homérique en son honneur, quand elle dit à Anchise que sa famille a connu au moins deux événements de ce type, avec Ganymède enlevé par Zeus et Tithonos enlevé par Éos. Ces humains « s'approchent le plus des dieux par l'apparence et la prestance ». De telles comparaisons permettent de considérer à la fois les ressemblances et les distinctions avec le cas de Phaéthon tel que le dessine la Théogonie. Car, s'il bénéficie lui aussi d'une complexion proche des dieux et de la fleur de la jeunesse, la destinée que lui réserve Aphrodite se situe dans ses sanctuaires, et donc parmi les hommes. Ce statut de « gardien du temple » permet d'affiner la notion de « puissance d'action d'une divinité parmi les hommes » que nous avons décelée jusqu'ici. Une ouverture vers certains profils sacerdotaux attestés dans l'Iliade et, bien plus tard, par Pausanias, permet également de confirmer la proximité potentielle entre prêtre/prêtresse et divinité desservie, et de comprendre l'association entre le statut de nêopolos et de daimôn de Phaéthon dans la Théogonie.
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Mar 14, 2019 • 1h 1min

06 - Dieux, daimones, héros

Vinciane Pirenne-DelforgeCollège de FranceReligion, histoire et société dans le monde grec antiqueAnnée 2018-2019Les deux œuvres intégralement conservées et attribuées à Hésiode poursuivent des objectifs différents. La Théogonie raconte sur le mode généalogique la naissance du monde et des dieux, jusqu'à l'installation ferme de la souveraineté de Zeus. Le point de vue adopté est un regard panoramique et surplombant sur l'ordre de Zeus et la stabilisation du cosmos. Les Travaux et les Jours déploient un point de vue davantage humain qui s'applique à une petite communauté paysanne devant assurer sa survie par un labeur informé de la qualité divine des « Jours » pour que ses « Travaux » soient efficaces. Un tel succès est subordonné à l'exercice de la justice, qui permet de profiter de ce labeur. Parmi les trois récits qui soutiennent le propos initial sur la condition humaine, le « mythe des races » que l'on appellera plus volontiers « récit des cinq espèces humaines » offre une représentation des daimones en tant que « gardiens des humains mortels ». En effet, les humains de l'âge d'or ne se distinguent des dieux que par leur mortalité qui les mène au statut post-mortem d'immortels sous la forme de daimones « gardiens » par la volonté de Zeus. L'Iliade offre, avec le daimôn,l'image d'une puissance divine en action, tandis que l'Odyssée atteste aussi la cristallisation potentielle d'agents divins envoyés par les dieux. En comparaison de ces œuvres, Les Travaux et les Jours n'offrent pas d'intrigue, mais une leçon de justice et une exhortation au travail qui placent l'une et l'autre Zeus en position dominante : il est maître de justice et pourvoyeur de prospérité, et c'est à son action dans le monde que se rapportent les daimones de l'âge d'or. D'Homère à Hésiode, on voit se dessiner une notion de daimôn qui sert à exprimer le « ressenti » subjectif d'une action divine tout en assumant potentiellement le profil d'une entité objectivée qui participe de la divinité qui l'envoie.

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