Lucie Wicky, sociologue à l'EHESS et à l'INED, spécialisée dans les violences sexuelles subies par les hommes, discute des enjeux cruciaux de ce phénomène. Elle aborde le silence autour des victimes masculines, souvent rejetées à l'écart des discours mainstream. Les agressions, souvent vécues durant l'enfance, affectent profondément la perception de la masculinité. Wicky met en lumière des dynamiques de pouvoir et les défis uniques auxquels sont confrontés les hommes, notamment ceux issus de la communauté LGBTQ+. Les initiatives récentes, comme #MeToo, ouvrent la voie à une réelle prise de parole.
Les témoignages récents des hommes victimes de violences sexuelles révèlent que 86% des agressions sont perpétrées par des hommes connus des victimes.
Les violences sexuelles subies par les hommes mettent en avant des rapports de domination adulte particulièrement marqués dans les cas d'agression sur des jeunes garçons.
Les effets des violences subies durant l'enfance incluent des problèmes de santé mentale et une redéfinition de la masculinité chez les victimes.
Deep dives
La parole des hommes victimes de violences sexuelles
Les témoignages d'hommes victimes de violences sexuelles ont émergé de manière plus significative ces dernières années, marqués par des événements médiatiques tels que l'affaire Barbarin. Ce cas a ouvert la voie à des mouvements comme MeTooGay et MeToo inceste, où des milliers d'hommes ont partagé leurs expériences d'agression sexuelle, souvent par des proches. Cela a permis de mettre en lumière des statistiques indiquant que 4% des hommes sont victimes de violences sexuelles au cours de leur vie. Malgré cela, la validation de leur expérience est souvent minimisée, notamment par des groupes masculinistes qui cherchent à banaliser ces violences en les érigeant au rang d'un problème généralisé, tout en négligeant que la grande majorité des agressions envers les hommes sont également perpétrées par d'autres hommes.
Les spécificités des violences subies par les hommes
Les violences sexuelles subies par les hommes présentent des particularités significatives, notamment en ce qui concerne l'âge des victimes et des agresseurs. La majorité des hommes agressés le sont avant l'âge de 25 ans, souvent par des hommes plus âgés, ce qui souligne un rapport de domination et d'exploitation. Ce phénomène met en lumière la question de la domination adulte et les inégalités de pouvoir dans les relations sexuelles, souvent sous-estimées dans les recherches générales sur les violences sexuelles. En revanche, les femmes, tout au long de leur vie, font face à un continuum de violences, tandis que les hommes semblent plus exposés aux agressions durant leur adolescence et leur enfance.
Facteurs de vulnérabilité et conditions de vie
Les conditions de vie des hommes durant l'enfance jouent un rôle central dans leur vulnérabilité face aux violences sexuelles. Les environnements familiaux atypiques, tels que vivre seul avec un parent ou être témoin de violences domestiques, augmentent le risque d'agression. De plus, la recherche a démontré que les hommes victimes de violences traumatiques durant leur enfance se décrivent souvent comme différents de leurs pairs, ce qui renforce leur sentiment d'isolement. Un score de mise en vulnérabilité a même été établi, montrant que ceux ayant subi des violences pendant leur enfance sont bien plus à risque de connaître des événements adverses tout au long de leur vie.
L'impact des violences sur la santé et la sexualité
Les effets des violences sexuelles sur les hommes se manifestent souvent par des problèmes de santé mentale et physique, avec un taux de tentatives de suicide plus élevé que la moyenne. Les comportements autodestructeurs, tels que la consommation problématique d'alcool et de drogues, sont fréquemment observés chez ceux qui ont souffert d'agressions. En outre, la sexualité des hommes victimes est souvent influencée par leurs expériences traumatiques, certains développant des pratiques sexuelles qu'ils évitent ou redéfinissent en raison des violences subies. Au fur et à mesure que ces hommes prennent conscience de leur trauma, leur rapport à la masculinité et aux normes de genre peut évoluer, menant à une auto-réflexion sur leurs comportements et attitudes.
Collectif et prise de parole sur les violences sexuelles
La création d'associations et de mouvements sociaux comme La Parole Libérée a favorisé une prise de parole collective parmi les hommes victimes de violences sexuelles. Ces espaces permettent non seulement de partager des expériences individuelles, mais aussi d'encourager d'autres victimes à dénoncer les abus. Une dynamique de soutien s'opère, où le partage de récits entre individus ayant vécu des expériences similaires rend plus visible le phénomène des violences sexuelles. Cependant, il reste essentiel d'adopter une perspective féministe dans cette lutte, pour s'assurer que les enjeux de genre et de pouvoir continuent à être considérés de manière interconnectée.
Depuis quelques années, les témoignages d’hommes victimes de violences sexuelles émergent sur les réseaux sociaux à travers les hashtags #MeTooGay, #MeTooInceste et #MeTooGarçons. Pourtant, ces voix peinent encore à être entendues. 86% de ces agressions sexuelles ou viols sont commis par d’autres hommes, et dans la plupart des cas, ce sont des hommes qu’ils connaissent : des hommes de leur famille, de l’école ou des espaces de pratiques sportives. Ces violences, vécues pour l’écrasante majorité dans l’enfance, marquent profondément la sexualité, la santé et la vision des normes de genre des hommes qui en sont victimes.
En quoi les violences sexuelles faites aux hommes sont des violences de genre ? Pourquoi la question de la domination adulte et celle de l’écart d’âge sont centrales quand on parle des garçons victimes ? Comment ces violences impactent leur regard sur leur masculinité ?
Les Couilles sur la table est un podcast créé par Victoire Tuaillon produit par Binge Audio. Cet entretien a été préparé, mené et monté par Tal Madesta, et enregistré le jeudi 06 février 2025 au studio Virginie Despentes de Binge Audio (Paris, 19e). Prise de son : Paul Bertiaux. Réalisation et mixage : Elisa Grenet. Supervision éditoriale et de production : Naomi Titti. Production, édition et communication : Marie Foulon avec Lise Niederkorn et Léna Fourgeau. Rédacteur en chef : Thomas Rozec. Direction de production : Albane Fily. Responsable administrative et financière : Adrienne Marino. Générique : Théo Boulenger. Identité graphique : Pierre Hatier (Upian). Composition identité sonore : Jean-Benoît Dunckel. Voix identité sonore : Bonnie El Bokeili. Direction des programmes : Joël Ronez.
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