Marc Joly, sociologue au CNRS et expert en perversion narcissique, partage son éclairage sur ce phénomène souvent sous-estimé. Il aborde les mécanismes de manipulation et de contrôle utilisés par ces individus, ainsi que leur impact sur les victimes. Joly discute des dynamiques de domination masculine au sein des relations, des défis juridiques auxquels font face les mères, et souligne l'importance d'améliorer la prise en charge de ces violences invisibles dans la société. Une analyse pertinente qui ouvre la voie à la compréhension et à la lutte contre ces comportements destructeurs.
Les pervers narcissiques manipulent psychologiquement leurs partenaires au moyen de stratégies insidieuses, comme le gaslighting et la culpabilisation, pour maintenir un contrôle total.
Les victimes de ces comportements, souvent dotées de grandes capacités intellectuelles, doutent de leur statut et restent invisibles dans une société peu sensible à leurs souffrances.
Il est crucial d'évoluer dans le discours public et le cadre légal pour reconnaître la violence psychologique comme une forme de violence de genre et protéger les victimes.
Deep dives
Compréhension des pervers narcissiques
Les pervers narcissiques sont souvent perçus comme des individus manipulatifs qui cherchent à détruire leur partenaire psychologiquement. Ce comportement peut être lié à une incapacité à accepter une position de domination egalitaire dans une relation. Les hommes ayant ces tendances exploitent des mécanismes de contrôle et de dénigrement, ce qui les amène à s'approprier leurs partenaires tout en prétendant le contraire. Ce phénomène, enraciné dans des héritages patriarcaux, crée un cycle de violence souvent invisible qui touche principalement les femmes.
Les victimes et leurs caractéristiques
Les femmes victimes de pervers narcissiques se caractérisent souvent par des ressources intellectuelles et créatives élevées, ce qui les rend particulièrement vulnérables à ce type de manipulation. Elles ont tendance à douter de leur statut de victime, même face à des comportements destructeurs et dégradants de la part de leurs partenaires. Cette dynamique est exacerbée par des antécédents d'absence de soutien affectif dans leur enfance, leur permettant ainsi de devenir des cibles idéales pour des hommes déterminés à les contrôler. Une invisibilité sociétale entoure souvent ces femmes, les rendant difficiles à reconnaître comme des victimes par leur entourage.
La manipulation et ses mécanismes
Les pervers narcissiques utilisent souvent des stratégies sophistiquées pour maintenir leur autorité sur leur victime, allant du gaslighting aux mensonges subtils. Ces techniques visent à faire douter la partenaire de sa propre perception de la réalité, générant confusion et isolation. Parfois, cette manipulation se manifeste également dans le cadre des procédures judiciaires, où les victimes se retrouvent dévalorisées face à un système qui doute déjà de leur crédibilité. Ainsi, il peut être difficile pour les femmes de prouver leur souffrance et leur vécu face à des agresseurs qui jouent habilement sur les attentes sociales.
L'impact sociétal et les réformes nécessaires
Les violences psychologiques et morales se retrouvent fraîchement intégrées dans le discours public, mais il existe encore une importante mécompréhension et un manque de légitimité autour des nuances de ces violences. Il est important de faire évoluer les discours, en particulier au sein des institutions judiciaires, pour permettre une meilleure reconnaissance de ces comportements en tant que forme de violence de genre. Le cadre légal doit évoluer pour inclure des protections spécifiques pour les victimes de tel comportement, en présumant que ceux qui ont été violents dans le cadre familial ne deviennent pas automatiquement de bons parents après une séparation. Un soutien adéquat aux associations qui aident les victimes pourrait également favoriser une sensibilisation accrue à cette problématique sociale.
La voix des victimes et les solutions
Les victimes de pervers narcissiques doivent chercher à s'entourer de soutiens, que ce soit dans leur cercle social ou au sein d'associations spécialisées, afin de rompre le cycle de violence. Pour cela, il est crucial de garder des preuves et de rester factuel dans les interactions avec l'agresseur. Des techniques d'intervention précoces peuvent également être mises en place pour aider les femmes à identifier les signes d'un comportement toxique sans s'enliser dans une relation destructrice. En cas de séparation, il est essentiel de préparer son départ afin de garantir sécurité et soutien à long terme.
Souvent minimisés, les témoignages des femmes qui se disent victimes de “pervers narcissiques” révèlent pourtant des clés essentielles pour comprendre des violences conjugales masculines spécifiques. Au départ, ces hommes ont tout pour plaire. Mais, peu à peu, ils déploient un arsenal de torture psychologique : manipulation, culpabilisation, discrédit, gaslighting…Autant de stratégies insidieuses pour tenter de s’approprier et contrôler leur conjointe, ou leur ex.
Qui sont les pervers narcissiques ? Comment et pourquoi tentent-ils de détruire leur proie ? Comment agissent-ils en cas de séparation ? Et surtout, comment faire pour éradiquer ces violences invisibles ?
Au micro de Naomi Titti, le sociologue Marc Joly, chargé de recherche au CNRS et auteur de « La Perversion narcissique. Étude sociologique » (éd. CNRS, 2024) a étudié ces profils pendant 6 ans, en croisant lectures de psychologie et psychanalyse, écrits sociologiques et travail de terrain auprès de l’association AJC – spécialisée dans la défense des victimes de violences morales intrafamiliales. Il explique pourquoi selon lui, ces hommes revêtent un nouveau visage de la domination masculine en couple.
RÉFÉRENCES CITÉES DANS L’ÉMISSION
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Les Couilles sur la table est un podcast créé par Victoire Tuaillon produit par Binge Audio. Cet entretien a été préparé, mené et monté par Naomi Titti, et enregistré le lundi 20 janvier 2025 au studio Virginie Despentes de Binge Audio (Paris, 19e). Prise de son, réalisation et mixage : Paul Bertiaux. Supervision éditoriale et de production : Naomi Titti. Production, édition et communication : Marie Foulon avec Lise Niederkorn et Léna Fourgeau. Rédacteur en chef : Thomas Rozec. Direction de production : Albane Fily. Responsable administrative et financière : Adrienne Marino. Générique : Théo Boulenger. Identité graphique : Pierre Hatier (Upian). Composition identité sonore : Jean-Benoît Dunckel. Voix identité sonore : Bonnie El Bokeili. Direction des programmes : Joël Ronez.
