

Conférence - Slim Laghmani - Y a-t-il une exception islamique en matière de droit international ?
Samantha Besson
Droit international des institutions
Collège de France
Année 2024-2025
Conférence - Slim Laghmani - Y a-t-il une exception islamique en matière de droit international ?
Slim Laghmani
Professeur émérite en droit, université de Carthage
Slim Laghmani est invité par l'assemblée du Collège de France sur proposition de la Pr Samantha Besson.
Résumé
Y a-t-il en matière de droit international une exception musulmane ? Nous tenterons dans ce cours de montrer que non. Le droit des gens en Islam n'est pas un droit positif, pas plus que ne l'est le jus gentium romain. Ce n'est donc pas à l'aune du droit international contemporain que l'on doit le juger. Le droit des gens musulman, que l'on nommait « siyar » (règles de comportement des musulmans avec les non musulmans), pour être intelligible, doit être rapproché des corpus juridiques qui avaient cours durant l'Antiquité et le Moyen Âge.
Dans son contenu normatif, le droit des gens musulman a été beaucoup plus déterminé par le cadre historico-politique dans lequel il a été développé et codifié, l'empire, que par la foi musulmane. Sa forme, sa rationalité interne et son fondement ont été, eux, déterminés par une lecture, une interprétation volontariste de l'Islam qui a été érigée en orthodoxie, un autre fait d'histoire donc.
La particularité du droit des gens musulman tient à ce que ce contenu normatif, cette rationalité interne et ce fondement ont été sacralisés et de ce fait figés et que cette historicité a été en quelque sorte refoulée de sorte que le commun des musulmans attribue au divin ce qui a été un fait humain.
Slim Laghmani
Slim Laghmani est né à Tunis en novembre 1957. Il est professeur retraité de l'université de Carthage. Il y a enseigné le droit international, la philosophie du droit, les droits de l'homme et le droit constitutionnel comparé. Il a dirigé de 2001 à 2013 le Laboratoire de recherche « Droit de l'Union européenne et relations Maghreb-Europe ».
Il est l'auteur, notamment, des Éléments d'histoire de la philosophie du droit, (t. I : La nature, la Révélation et le Droit, Tunis, 1993 ; t. II : La modernité, l'État et le Droit, Tunis, 1999). Il a publié en commun avec Ali Mezghani, Écrits sur le Droit et la Modernité, (Tunis, 1994, en langue arabe). Il est également l'auteur d'une Histoire du droit des gens publiée chez Pedone (Paris) en 2004, d'un opuscule intitulé Islam, le pensable et le possible publié par les éditions le Fennec à Casablanca en 2005. Il a codirigé depuis 1994, avec Rafâa Ben Achour, la collection Rencontres internationales de la Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, huit volumes ont été publiés par les éditions Pedone et a contribué au Traité international de droit constitutionnel (trois volumes, Paris, Dalloz, Traités Dalloz, 2012).
Il a été membre du Comité des experts au sein de la Haute Instance de réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, président de la sous-commission des libertés publiques. Il est président de l'Association tunisienne de droit constitutionnel et membre du Conseil scientifique de l'Académie internationale de droit constitutionnel. Il a été membre de la Commission des libertés individuelles et de l'égalité.