Le racisme ordinaire des électeurs du RN - Félicien Faury
Jul 6, 2024
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Félicien Faury, sociologue spécialiste des dynamiques électorales, analyse les électeurs du Rassemblement National en mettant en lumière leur rejet d'un ordre social dominant. Il explore la complexité de leurs motivations, loin d'une simple méprise. Les inégalités socio-économiques, la concurrence perçue avec les minorités et l'influence des médias façonnent leurs opinions. Faury évoque aussi une possible alliance entre classes populaires et souligne l'importance d'une lutte collective contre le racisme dans le discours politique.
L'électorat du Rassemblement National représente une vision ordinaire du monde, façonnée par des expériences quotidiennes et des émotions simples comme le racisme.
Les préoccupations économiques et l'accès aux ressources ont un impact significatif sur les comportements électoraux, rendant cet électorat hétérogène et complexe.
Le racisme est conçu comme une relation de pouvoir structurelle dans la société, influencée par des discours médiatiques et politiques qui légitiment ces attitudes.
Deep dives
Normalisation de l'extrême droite
L'épisode aborde comment la normalisation de l'extrême droite se manifeste à travers des discours ordinaires adoptés par les électeurs du Rassemblement National et d'autres partis similaires. Au lieu de considérer ces discours comme élaborés ou intellectuels, ils sont souvent basés sur des sentiments affectifs simples, tels que le racisme et la xénophobie. L'enquête menée auprès de différentes classes sociales, en particulier dans le sud de la France, révèle que ces électeurs se préoccupent moins de l'idéologie et plus de leurs expériences quotidiennes. Cette approche permet de voir le vote d'extrême droite non pas comme un phénomène marginal, mais comme une expression d'une vision ordinaire du monde partagée par une partie de la population.
Électorat complexe de l'extrême droite
La discussion met en lumière la complexité de l'électorat du Rassemblement National, qui ne se limite pas aux clichés d'ouvriers désindustrialisés du Nord. L'enquête montre que des électeurs issus de classes moyennes et d'employés peuvent également voter pour l'extrême droite, souvent en raison de préoccupations économiques liées à l'accès au logement, aux impôts ou aux services publics. Ces préoccupations matérielles sont souvent liées à des sentiments de frustration et d'exclusion face à la distribution des ressources. Ainsi, le racisme et la xénophobie s'entremêlent avec des enjeux socio-économiques, rendant cet électorat hétérogène et difficile à réduire à un simple profil socio-démographique.
Distinctions Nord-Sud
L'épisode explore les distinctions entre l'électorat du Nord et du Sud de la France en matière de perception du racisme et de conditions socio-économiques. Les électeurs du Nord sont souvent liés à la précarité et à des peurs économiques liées à la désindustrialisation, tandis que ceux du Sud, en particulier en région PACA, se préoccupent davantage de la concurrence résidentielle et de l'accès aux quartiers attractifs. Cette distinction met en évidence la manière dont le racisme s'exprime différemment selon les contextes locaux et les conditions économiques. Les discussions mettent l'accent sur l'interrelation entre classe sociale, identité et racisme, soulignant que le racisme n'est pas seulement une question d'idéologie, mais aussi une réaction face à des réalités économiques et sociales.
Racisme comme relation de pouvoir
Une des idées centrales discutées est que le racisme ne doit pas être vu simplement comme une attitude individuelle, mais comme une relation de pouvoir structurée au sein de la société. Cette approche se concentre sur les mécanismes qui alimentent les inégalités ethnoraciales, avec une attention particulière à la manière dont ces inégalités sont perçues et vécues par les électeurs. L'épisode souligne que les préjugés racistes sont souvent intégrés dans des récits plus larges qui justifient les inégalités sociales, par exemple à travers des représentations d'immigrés comme des concurrents pour les ressources. Ce traitement sociologique du racisme incite à réfléchir à la façon dont ces dynamiques de pouvoir influencent les comportements électoraux et les attitudes sociales.
Articulation des préoccupations économiques et raciales
Le lien entre préoccupations économiques et attitudes racistes est également mis en avant, suggérant que les préoccupations budgétaires peuvent alimenter des sentiments xénophobes. Les électeurs expriment souvent des craintes que leurs ressources soient détournées pour aider des groupes qu'ils perçoivent comme moins méritants, accentuant la notion de 'préférence étrangère'. Cette colère peut être dirigée à la fois contre l'État et contre des populations issues de l'immigration, créant une dynamique où la pauvreté et le racisme se nourrissent mutuellement. Le débat révèle que ces croyances ne doivent pas être sous-estimées, car elles forment la base d'un sentiment d'injustice qui alimente le soutien à l'extrême droite.
Définition du racisme et implication des élites
Enfin, l'épisode remet en question les définitions courantes du racisme, soulignant que ce dernier ne se limite pas à l'expression d'opinions individuelles mais est encouragé par des structures de pouvoir plus larges. Les élites, qu'elles soient économiques ou culturelles, jouent un rôle dans la diffusion de ces idées, souvent de manière plus insidieuse. Le discours médiatique et politique contribue à la légitimation des sentiments racistes, imprégnant ainsi la société d'une perception racialisée des problèmes sociaux. Cette analyse appelle à un examen critique des discours qui façonnent les attitudes racistes et évoque la nécessité d'une lutte antiraciste plus intégrative au sein de la société.
On entend souvent « à gauche » cette petite musique condescendante à propos des électeurs du Rassemblement National. Ils seraient « fachés mais pas fachos », simplement trompés par la communication dédiabolisée du parti d'extrême droite. Il s'agirait donc de leur apporter la lumière, de leur prouver que derrière les beaux discours populistes se cache du racisme crasse, leur démontrer qu'ils se trompent quand ils votent et comprennent mal leurs intérêts de classe. Le sociologue Félicien Faury a mené une enquête au long cours sur ces électeurs dans le Sud-Est de la France et le moins que l'on puisse dire c'est qu'il complexifie et radicalise ces analyses de plateaux télés : on ne vote pas RN par méprise ou manque d'éducation mais pour défendre un ordre du monde, racial et dominant. (Pour une présentation plus étoffée de cet entretien, rdv sur lundimatin)
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