Philippe Bihouix : « Dans le futur, nous serons fiers de savoir réparer les objets »
Apr 22, 2025
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Philippe Bihouix, ingénieur et pionnier de la low-tech, évoque un futur où la réparation d'objets devient une fierté. Il alerte sur la pénurie des métaux et plaide pour une consommation durable. Les discussions portent sur la nécessité de réinventer notre rapport à la technologie en favorisant la sobriété et en adoptant des innovations respectueuses de l'environnement. Bihouix met également en avant des initiatives telles que les Repair Café, promouvant une culture de la réparation et du partage pour faire face à l'obsolescence programmée.
Philippe Bihouix souligne l'importance d'une sobriété systémique pour envisager un avenir durable en harmonie avec la nature.
L'urbanisme doit évoluer pour favoriser la coexistence respectueuse entre environnement et développement humain par des solutions comme l'accès au transport public.
L'innovation technologique doit être guidée par une conscience environnementale, valorisant la réparation et l'entretien plutôt qu'une consommation rapide et obsolète.
Deep dives
Visions du monde d'après
Le monde d'après est imaginé comme un espace où l'humanité est en harmonie avec la nature, marquée par une réconciliation avec le vivant. Ce nouveau monde ne se limite pas à une sobriété austère, mais aspire à une sobriété systémique qui favorise des valeurs évolutives et des rêves différents. Les scénarios technologiques, tels que des assistants personnels ou des robots, ne devraient pas définir notre quotidien, même si ces promesses d'abondance persistent. Au lieu de cela, la quête du bonheur et de l'épanouissement dans ce monde futur dépendra de notre capacité à redéfinir nos valeurs et nos aspirations collectives.
Ressources et résilience
La réintroduction de valeurs de frugalité est essentielle pour concevoir un avenir durable, particulièrement dans un contexte de changements climatiques menaçants. Les exemples de zones marines protégées montrent que la vie marine peut revenir rapidement si des mesures appropriées sont prises, illustrant ainsi la résilience des écosystèmes. En parallèle, l'urbanisme doit évoluer pour promouvoir une coexistence respectueuse entre l'environnement et le développement humain, comme la promotion de la bicyclette et l'accès au transport public. Adopter des pratiques agricoles plus durables tout en acceptant une baisse de rendement pourrait également être une voie vers une meilleure qualité des produits et de la santé.
Sobriété systémique
La notion de sobriété systémique va au-delà des efforts individuels et cherche à impliquer une transformation des structures sociales et économiques. Il s'agit d'une approche collective où l'organisation sociale facilite la réduction de la consommation et l'utilisation des ressources. Par exemple, la promotion de voitures plus petites et plus légères doit être soutenue par des choix politiques et culturels adaptés. Ainsi, l'acceptation d'un mode de vie moins axé sur la consommation de masse pourrait être bénéfique pour créer un système doux qui réduit notre empreinte écologique.
La place de l'innovation
L'innovation technologique doit être équilibrée avec une approche durable, évitant de créer des produits obsolètes dont la production est plus polluante que bénéfique. Les gains de productivité réalisés grâce aux dernières technologies peuvent souvent masquer les externalités environnementales, incitant les entreprises à chercher des solutions rapides plutôt qu'éthiques. La production et le développement de nouvelles solutions devraient être guidés par une conscience environnementale, où la réparation et l'entretien des produits sont valorisés au lieu d'une simple consommation. Ainsi, il devient crucial de réévaluer notre rapport aux ressources et à la technologie pour assurer une durabilité à long terme.
Une adaptation nécessaire
L'adaptation à un monde de plus en plus chaud et instable requiert de repenser notre manière de vivre et d'interagir avec notre environnement. Des solutions organisationnelles, comme l'adoption d'horaires scolaire en fonction des températures, pourraient favoriser le bien-être en période de canicule. L'idée d'accepter de vivre avec moins de confort, mais d'apprendre à s'organiser collectivement pour faire face aux pénuries est la clé. Enfin, cette transition nécessitera un engagement politique et social pour encourager des changements comportementaux profonds vis-à-vis de notre rapport à la nature et aux ressources.
Philippe Bihouix est ingénieur. Après avoir été l’un des premiers à alerter sur la pénurié à venir des métaux, il a été un pionnier en France de la low-tech. Il a publié, avec Vincent Perrot, la BD Ressources (éd. Casterman). Cet entretien du Monde d’après a été enregistré au Musée des arts et métiers, en partenariat avec celui-ci.