Coalitions politiques : pourquoi les partis français ne parviennent pas à s’entendre [REDIFF]
Dec 13, 2024
auto_awesome
Dans cet échange intrigant, Anne Chemin, journaliste au service Idées du Monde et experte en politique française, explore l'instabilité politique actuelle en France. Elle discute des difficultés des partis à former des coalitions efficaces et compare ce contexte à d'autres pays européens. Chemin révèle comment l'hyperprésidentialisme a évolué depuis la Constitution de 1958, impactant la dynamique législative. Elle soulève également des idées sur la revitalisation du parlementarisme et les réformes institutionnelles nécessaires.
Les partis politiques en France montrent une incapacité à négocier des coalitions, exacerbée par un système d'hyperprésidentialisme qui déséquilibre l'exécutif et le législatif.
La nécessité d'une réévaluation du rôle du Parlement est cruciale pour surmonter l'absence de majorité et restaurer les pratiques démocratiques.
Deep dives
Instabilité politique en France
La France est confrontée à une instabilité politique sans précédent suite à l'absence de majorité claire dans l'Assemblée nationale. La censure du gouvernement de Michel Barnier a suscité des interrogations sur la capacité de la Ve République à gérer une situation politique fragmentée. Contrairement à d'autres pays où la négociation entre partis est courante, les partis français semblent incapables de former des coalitions, ce qui entraîne des blocages. Cela soulève des questions sur la culture politique en France et sur la façon dont la Ve République pourrait évoluer pour s'adapter à cette nouvelle réalité.
Comparaison avec d'autres systèmes
L'approche des partis politiques en Espagne lors des élections générales illustre comment des négociations peuvent aboutir à des gouvernements de coalition. Alberto Nunes Feiro, bien qu'arrivant en tête, n'a pas obtenu la majorité nécessaire, mais a choisi de dialoguer pour former un gouvernement. D'un autre côté, en France, le Président Emmanuel Macron a maintenu une approche centralisée engendrant une incompatibilité avec les pratiques parlementaires dans des situations sans majorité. En comparaison, d'autres pays comme l'Allemagne montrent comment un processus de négociation approfondi peut mener à une coalition stable, renforçant ainsi le pouvoir parlementaire.
L'hyperprésidentialisme et ses conséquences
Le régime de la Ve République a évolué vers un système d'hyperprésidentialisme, provoquant des déséquilibres dans le pouvoir entre l'exécutif et le législatif. Des pratiques telles que l'utilisation du 49.3 pour faire avancer des réformes impopulaires sans vote parlementaire ont altéré les principes démocratiques. Cette situation témoigne d'une culture politique où la négociation et le compromis sont perçus comme des faiblesses. Les débats actuels sur la nécessité d'un nouveau cadre législatif montrent que, pour faire face à l'absence de majorité, il pourrait être vital de réévaluer et de redynamiser le rôle du Parlement dans le processus décisionnel.
Le 7 juillet, les élections législatives anticipées, à la suite de la dissolution prononcée par Emmanuel Macron, ont divisé l’Assemblée nationale en trois forces d’envergure à peu près égale : le Nouveau Front populaire, arrivé en tête du scrutin, suivi de la coalition présidentielle Ensemble et du Rassemblement national. Aucune de ces formations n’a obtenu la majorité absolue.
Dans d’autres pays, lorsque ce genre de situation se présente, les partis peuvent s’entendre pour proposer une coalition avec un programme de compromis. Et le président de la République aurait alors tenu le rôle d’arbitre impartial. Mais en France, tout le monde semble déboussolé : les partis politiques rechignent à discuter et à s’entendre avec d’autres forces. Quant au président de la République, loin d’endosser le rôle d’arbitre, il manœuvre pour nommer un premier ministre qui ne s’attaque pas trop à son bilan.
Les institutions de la Ve République et la prééminence présidentielle de ce régime sont-elles à mettre en cause ?
Dans cet épisode du podcast « L’Heure du Monde », Anne Chemin, journaliste au service Idées du Monde, nous explique que, contrairement aux idées reçues, la Constitution de 1958 propose au départ un régime parlementaire qui a connu une lente dérive vers le présidentialisme.
Un épisode de Garance Muñoz et Cyrielle Bedu. Réalisation : Thomas Zeng. Présentation et suivi éditorial : Jean-Guillaume Santi.
--- Pour soutenir "L'Heure du Monde" et notre rédaction, abonnez-vous sur abopodcast.lemonde.fr