Dans cet échange captivant, Florence Rosier, journaliste scientifique au Monde et experte en neurosciences, explore l'amnésie infantile, ce mystère qui fait que nos souvenirs d'enfance semblent si flous. Elle décortique comment nos souvenirs se forment, pourquoi tant d'entre eux disparaissent, et le rôle crucial de l'hippocampe dans ce processus. En réfutant des théories, elle discute aussi de l'impact de la neurogénèse sur notre mémoire et offre des conseils aux parents pour préserver les souvenirs de leurs enfants. Un véritable voyage dans les méandres de notre mémoire!
L'amnésie infantile illustre l'incapacité des adultes à se souvenir de leurs expériences avant l'âge de 2 ou 3 ans.
La distinction entre la mémoire autobiographique et d'autres formes de mémoire éclaire la compréhension des souvenirs perdus chez les jeunes enfants.
Deep dives
L'amnésie infantile et ses origines
L'amnésie infantile décrit l'incapacité des adultes à se remémorer des souvenirs de leur petite enfance, généralement avant l'âge de 2 ou 3 ans. Ce phénomène, longtemps théorisé par des psychologues comme Freud, est maintenant compris différemment à travers les neurosciences contemporaines. Les chercheurs s'accordent à dire que même si les jeunes enfants peuvent créer des souvenirs, ces derniers ne sont pas facilement accessibles durant l'adolescence ou l'âge adulte. Ce processus est attribuable à l'immaturité de l'hippocampe, une région cérébrale cruciale pour le stockage et le rappel des souvenirs, qui ne finit de se développer qu'à partir de six ans.
Le rôle des différents types de mémoire
La distinction entre la mémoire autobiographique et d'autres formes de mémoire est essentielle pour comprendre l'amnésie infantile. Tandis que la mémoire autobiographique, qui concerne les souvenirs d'expériences vécues, est la plus affectée par l'amnésie infantile, d'autres mémoires, telles que la mémoire procédurale, demeurent intactes. Ces dernières permettent aux jeunes enfants d'apprendre des compétences essentielles comme marcher ou faire du vélo, sans être influencées par l'incapacité de se souvenir de leurs premières expériences. Ce mécanisme assure que les enfants peuvent continuer à intégrer des connaissances pratiques tout en ayant des lacunes dans leur mémoire des événements passés.
Les implications évolutionnaires de l'amnésie infantile
L'amnésie infantile pourrait également avoir des implications évolutives pour l'espèce humaine. En comparant différents mammifères, les chercheurs ont découvert que ceux qui nécessitent davantage de soins parentaux, comme les humains, présentent cette amnésie, en contraste avec ceux qui sont plus autonomes dès la naissance. Cette caractéristique pourrait favoriser la transition d'une dépendance totale à une autonomie adulte en supprimant les souvenirs précoces moins pertinents pour la vie adulte. Actuellement, des études sont menées pour déterminer si ces souvenirs, bien qu'apparemment oubliés, pourraient être récupérés sous certaines conditions, mais des recherches supplémentaires sont nécessaires pour valider ces hypothèses.
Si précieux soient-ils, nos souvenirs d’enfance nous échappent. Images brouillées, récit brouillon… Quand l’envie nous prend de les convoquer, force est de constater que ce qu’il en reste, c’est souvent du flou. Ce phénomène porte un nom : l’amnésie infantile. Comprenez : l’incapacité, une fois adulte, à se remémorer des évènements vécus dans la petite enfance. Personne, ou presque, ne se souvient de ses expériences vécues avant l’âge de 2 ou 3 ans. Et l’accès à des souvenirs antérieurs à l’âge de 5 ou 6 ans reste difficile.
Comment les souvenirs se forment-ils dans le cerveau des jeunes enfants ? Pourquoi disparaissent-ils ensuite ? La mémoire les a-t-elle supprimés ou sont-ils simplement cachés quelque part dans notre cerveau ?
Dans cet épisode du podcast « L’Heure du Monde », Florence Rosier, journaliste scientifique au Monde, répond à toutes ces questions et nous raconte les dernières découvertes des neurosciences en la matière.
Un épisode écrit par Claire Leys et présenté par Jean-Guillaume Santi. Réalisation : Thomas Zeng. Musiques originales : Amandine Robillard. Rédaction en chef : Adèle Ponticelli. Dans cet épisode : lectures d’extraits de Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier, de Patrick Modiano ; Psychopathologie de la vie quotidienne, de Sigmund Freud ; Du côté de chez Swann, de Marcel Proust. Extrait du film Vice-Versa, de Pete Docter et Ronnie Del Carmen, et du concerto Les Quatre Saisons d’Antonio Vivaldi.