La gouvernance par les nombres souligne une transformation où l'efficacité technique remplace les valeurs humaines fondamentales dans les relations sociales.
Les approches chinoises et occidentales de la loi révèlent des visions distinctes, l'une favorisant l'ordre et l'autre garantissant des droits individuels.
L'automatisation croissante dans la gestion étatique en Chine soulève des inquiétudes sur la déshumanisation et la perte d'humanité dans des processus cruciaux.
Deep dives
La gouvernance par les nombres dans l'Occident moderne
Le concept de gouvernance par les nombres est exploré comme une réponse à la quête d'harmonie sociale à travers des méthodes quantitatives. Selon Alain Suppiau, cette approche révèle une dynamique où la loi traditionnelle est remplacée par des programmes basés sur des objectifs mesurables, ce qui conduit à une déshumanisation des relations sociales. Des exemples récents, comme la coalition des volontaires évoquée par certains dirigeants européens, illustrent cette tendance, où les allégeances se forment autour de chiffres plutôt que de principes juridiques. En effet, ce schéma de pensée met en évidence une transformation vers un modèle où l'efficacité et la technique dominent, au détriment des valeurs humaines fondamentales.
Les méthodes d'organisation en Chine
Romain Graziani, dans son ouvrage, présente la manière dont la Chine a historiquement utilisé des méthodes impersonnelles pour instaurer l'ordre au sein de sa société. Cette approche privilégie l'impartialité et minimise l'intervention humaine, ce qui peut conduire à une déshumanisation dans la gouvernance, où le contrôle social se fonde sur des lois techniques plutôt que sur des droits humains. Il souligne que ces lois en Chine sont davantage orientées vers l'efficacité et la gestion des ressources, sans véritable considération pour la justice, une distinction majeure par rapport aux conceptions occidentales. Ainsi, les classes sociales sont définies par leur utilité productive, renforçant l'idée que le calcul prédomine sur les valeurs éthiques.
Impacts des nombres sur la perception de la réalité
La discussion met en lumière le rôle des nombres dans la compréhension et l'organisation du monde, notamment en Chine, où ils ne se limitent pas à des unités quantitatives. Graziani évoque un manuscrit ancien qui illustre comment les nombres servent à ordonner les activités sociales et gouvernementales, pointant vers une philosophie où leur manipulation peut transformer la perception de la réalité. Cette vision contraste avec celle de l'Occident, où les nombres sont souvent associés à des concepts abstraits de calcul. Par conséquent, cette différence souligne une logique culturelle distincte quant à l'utilisation et à la signification des nombres dans la gouvernance.
Les similitudes et différences entre l'Occident et la Chine
Les échanges entre Alain Suppiau et Romain Graziani révèlent des similitudes dans la façon dont les nombres sont utilisés pour orchestrer des systèmes politiques, mais aussi des divergences significatives dans la compréhension des lois. Suppiau insiste sur le fait qu'en Occident, la loi vise à garantir des droits individuels, alors qu'en Chine, elle est souvent perçue comme un outil de contrôle et d'exploitation des citoyens. Cette dialectique met en évidence une anthropologie politique où l'individu est soumis à un système perçu comme supérieur, qu'il s'agisse de la loi ou du pouvoir numérique. Il en découle que, là où l'Occident valorise la liberté individuelle, la Chine privilégie l'ordre et l'efficacité par le biais de structures impersonnelles.
L'évolution du rôle de l'État face à la gouvernance numérique
Les réflexions sur l'État dans le contexte de la gouvernance par les nombres nous montrent une évolution vers l'automatisation et la déshumanisation de certaines fonctions étatiques. En Chine, des initiatives comme les juges robots et les systèmes de police sans agents humains illustrent une tendance à externaliser des attributs traditionnellement humains au profit de la machine. Cette automatisation soulève des préoccupations quant à la perte d'humanité dans des processus cruciaux, tels que la justice et la sécurité publique. Par contraste, en Occident, des efforts sont en cours pour imposer des limites à la surveillance et à la collecte de données, soulignant des différences culturelles fondamentales dans l'approche face à la technologie et à l'État.
durée : 01:00:57 - La Conversation scientifique - par : Etienne Klein - Ce que nous entendons par « lois » et « nombres » dans les sociétés européennes correspond-il aux instruments développés en Chine ? ou bien y a-t-il entre eux des différences fondamentales que dissimuleraient des traductions un peu trop simplistes ? - réalisation : Luc-Jean Reynaud - invités : Romain Graziani Professeur en études chinoises à l’école normale supérieure de Lyon; Alain Supiot Juriste, docteur honoris causae, professeur émérite au Collège de France
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