Mandat d’arrêt contre Benyamin Nétanyahou : un tournant historique pour la CPI
Dec 2, 2024
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Stéphanie Maupas, correspondante du Monde à La Haye et spécialiste de la justice internationale, discute d'un tournant historique avec les mandats d'arrêt émis contre Benyamin Nétanyahou et Yoav Gallant pour crimes de guerre. Elle explore les implications de cette décision pour la CPI et la justice internationale. Les réactions des pays occidentaux, y compris la France qui évoque l'immunité de Nétanyahou, soulèvent des questions sur l'application des droits humains. Maupas souligne également les défis auxquels la CPI est confrontée dans le cadre du conflit israélo-palestinien.
Les mandats d'arrêt contre Nétanyahou et Galante, accusés de crimes de guerre, marquent un tournant historique pour la CPI.
L'affirmation de l'immunité de Nétanyahou par la France remet en question l'autorité de la CPI et soulève des préoccupations sur ses capacités d'exécution.
Deep dives
Mandats d'arrêt pour crimes contre l'humanité
Benjamin Netanyahou et Yoav Galante sont accusés par la Cour pénale internationale de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre, en raison de leurs actions à Gaza, à partir du 8 octobre 2023. Les chefs d'inculpation incluent des actes tels que l'utilisation de la famine comme méthode de guerre, des attaques intentionnelles contre des civils et des persécutions. Ces décisions marquent un point tournant pour la CPI, souvent critiquée pour ne pas avoir poursuivi des responsables occidentaux. Les juges affirment avoir des motifs raisonnables de croire que ces dirigeants israéliens ont sciemment privé la population civile de Gaza des ressources nécessaires à sa survie.
Implications des mandats d'arrêt
Les mandats d'arrêt émis par la CPI soulèvent des questions sur leur exécution, étant donné que la cour ne dispose pas de forces de police propres et dépend des États signataires pour effectuer les arrestations. Parmi les 124 pays ayant adhéré à la CPI, des nations alliées d'Israël, comme le Royaume-Uni et les membres de l'Union Européenne, sont tenues de coopérer. Cependant, comme Israël n'est pas signataire de la cour, Netanyahou et Galante pourraient échapper à l'arrestation en circulant dans des pays qui ne reconnaissent pas la CPI, comme les États-Unis ou l'Inde. La CPI espère que la diffusion publique de ces mandats incitera d'autres pays à respecter leurs obligations, mais la situation demeure complexe.
Réactions internationales et crédibilité de la CPI
Les mandats d'arrêt contre des responsables israéliens sont perçus comme un changement significatif dans la justice internationale, soulignant un traitement potentiellement inéquitable à l'égard des pays occidentaux. Cette situation pourrait être aggravée par des pressions émanant de pays comme les États-Unis, qui menacent de sanctions contre la CPI et incitent d'autres nations à ne pas exécuter les mandats. De plus, la position de la France, affirmant l'immunité diplomatique de Netanyahou, pourrait entraver l'exécution de ces mandats et affaiblir par conséquent la légitimité de la CPI. Ces défis soulèvent des interrogations sur la capacité de la CPI à maintenir sa crédibilité face à des accusations de double standard dans le traitement des différents acteurs internationaux.
Depuis sa création, en 1998, la Cour pénale internationale (CPI) ne s’est que très rarement opposée aux intérêts occidentaux. Jeudi 21 novembre, en émettant des mandats d’arrêt contre le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, et son ancien ministre de la défense, Yoav Gallant, l’institution de La Haye a engagé un tournant historique.
Les deux hommes sont poursuivis pour des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, dans le contexte de la guerre à Gaza. Le chef de la branche armée du Hamas, Mohammed Deif, est poursuivi pour les mêmes crimes, dans le cadre de son implication dans les attaques du 7 octobre 2023, mais il est présumé mort.
La France, signataire du traité fondateur de la CPI, a estimé, mercredi 27 novembre, que Benyamin Nétanyahou bénéficiait d’une « immunité », Israël n’étant pas partie au statut de Rome qui fonde la juridiction internationale. Cette déclaration a scandalisé les défenseurs des droits de l’homme.
Qu’est-il reproché précisément à Benyamin Nétanyahou et à Yoav Gallant ? Risquent-ils d’être arrêtés ? Et comment analyser les réactions des pays occidentaux, qui sapent l’autorité de la CPI, en remettant en cause l’application de ces mandats d’arrêt ?
Dans cet épisode du podcast « L’Heure du Monde », Stéphanie Maupas, la correspondante du Monde à La Haye et spécialiste de la justice internationale, analyse les ressorts de cette décision.
Un épisode de Claire Leys. Réalisation et musiques originales : Amandine Robillard. Rédaction en chef et présentation : Adèle Ponticelli. Dans cet épisode : extrait de la conférence de presse du procureur de la CPI, Karim Khan, le 20 mai 2024 ; d’une prise de parole du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, le 21 novembre 2024 ; d’une prise de parole du chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, le 21 novembre 2024.