Dans cette discussion captivante, Dorothée Schmid, experte en sciences politiques au Moyen-Orient, Michel Duclos, ancien ambassadeur en Syrie et conseiller géopolitique, Igor Delanoë, spécialiste en géopolitique franco-russe, et Clément Therme, expert en politique iranienne, évaluent les conséquences de la chute du régime d'Assad. Ils abordent l'évolution de l'identité des leaders, les luttes des Kurdes, les stratégies géopolitiques d'acteurs comme la Turquie et Israël, ainsi que les défis des Syriens en exil et l'importance du dialogue international.
La chute du régime Assad en Syrie ouvre la voie à de nouveaux acteurs régionaux comme la Turquie et Israël, modifiant l'équilibre géopolitique du Moyen-Orient.
Abu Mohamed Al-Joulani de HTS adopte une approche pragmatique pour reconstituer son image, tout en maintenant des préoccupations sur les droits des femmes et des minorités.
Le déclin de l'influence de la Russie et de l'Iran en Syrie soulève des questions sur la vulnérabilité de Téhéran face à des dynamiques régionales changeantes.
Deep dives
Prise de pouvoir par HTS et pertes du régime Assad
Le groupe djihadiste Hayat Tahrir al-Sham (HTS) a rapidement pris le contrôle de la majeure partie de la Syrie, évincant le régime d'Assad, qui a dû se réfugier à Moscou. Cette chute soudaine a été perçue comme un changement majeur dans le paysage politique syrien, remettant en cause la domination de la Russie et de l'Iran dans la région après de nombreuses années de conflit et d'influence. Les Syriens, après des années de souffrances et de pertes, expriment un mélange d'espoir et de scepticisme face à ces évolutions politiques. Cela ouvre également la voie à de nouveaux acteurs régionaux, notamment la Turquie et Israël, qui cherchent à tirer profit de la situation.
Ambitions et stratégie du nouveau leader djihadiste
Abu Mohamed Al-Joulani, leader de HTS, fait preuve de pragmatisme en se présentant comme un héros national plutôt qu'un simple djihadiste. Il a changé son nom pour souligner ses racines syriennes et renforcer son image auprès de la population. La promesse d'une transition pacifique excluant les partisans d'Assad pourrait indiquer une volonté de changer l'image du groupe sur la scène internationale. Cependant, la nature islamiste du mouvement reste source de préoccupations, notamment en ce qui concerne les droits des femmes et des minorités.
La position précaire de la Russie et de l'Iran
La récente débâcle du régime Assad marque un affaiblissement significatif pour la Russie et l'Iran, qui avaient misé sur sa survie pour maintenir leur influence au Moyen-Orient. Les médias russes reconnaissent la responsabilité d'Assad dans cette chute, soulignant son obstination à refuser toute négociation avec des acteurs régionaux. De plus, la réallocation des forces russes vers le conflit en Ukraine a diminué leur capacité d'intervention en Syrie. Ce retournement exacerbe le sentiment de vulnérabilité de l'Iran face à un paysage géopolitique changeant et à une possible restructuration de leur influence régionale.
Rôle croissant d'Israël et implications géopolitiques
Israël profite de l'effondrement du régime Assad pour renforcer sa présence sur le plateau du Golan et détruire les infrastructures militaires syriennes. Les conséquences de ce déséquilibre régional sont ressenties avec une intensification des tensions entre Israël et ses voisins, notamment en raison des répercussions des récents événements dans la région. La dynamique de recomposition géopolitique pourrait signifier une réévaluation des relations entre Israël, la Turquie et le nouvel État syrien. Israël considère que la situation actuelle est une occasion d'affaiblir davantage l'Iran et ses alliés tactiques, comme le Hezbollah.
Enjeux de l'intégration des Kurdes et des réfugiés syriens
Les Kurdes, soutenus par les États-Unis, détiennent des territoires au nord-est de la Syrie et représentent un enjeu crucial dans les négociations futures. Leur statut en tant que minorité pourrait être remis en question par le nouveau régime, qui prône une inclusivité, mais reste affecté par les tensions historiques avec la Turquie. Parallèlement, des centaines de milliers de réfugiés syriens rêvent de rentrer chez eux, exacerbant les préoccupations sécuritaires en Europe concernant le retour potentiellement radicalisé de certains d'entre eux. La complexité de ce retour s'ajoute à l'incertitude quant à la gestion des détenus de Daesh, qui demeurent une menace sérieuse dans la région.
durée : 00:59:36 - Affaires étrangères - par : Christine Ockrent - Suite à la chute du régime de Bachar al-Assad en Syrie, qu'attendre du nouveau pouvoir à Damas ? Quelles conséquences pour le Moyen-Orient et le reste du monde ? - réalisation : Luc-Jean Reynaud - invités : Dorothée Schmid Docteure en sciences politiques, responsable du programme Turquie/Moyen-Orient de l'Ifri; Michel Duclos Conseiller spécial géopolitique et diplomatie à l’Institut Montaigne, ancien ambassadeur; Igor Delanoë est Directeur-adjoint de l'Observatoire franco-russe et chercheur associé à l'IRIS; Clément Therme Chargé d'enseignement à l'Université Paul Valéry de Montpellier et à Sciences Po Paris, spécialiste du monde iranien
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